Par Perrine MOUTERDE
Les salafistes libanais soutiennent ouvertement les opposants syriens et dénoncent l’attitude du gouvernement, qui comprend le Hezbollah. Ils appellent aussi les chrétiens à « prendre leur distance » à l’égard de Damas.
C’est sous bonne escorte que le sheikh Dai al-Islam al-Chahal se rend à la grande prière du vendredi. Un groupe d’hommes, dont plusieurs sont armés, l’attend au pied de son immeuble du quartier d’Abi Samra, à Tripoli (Liban). Fils de Salem al-Chahal, le fondateur du mouvement salafiste au Liban, il en est aujourd’hui la figure de proue.
Les yeux clairs, la barbe blanche, il dirige l’Association pour le conseil et la charité, qui œuvre essentiellement dans le domaine de l’éducation. « Le régime criminel de Bachar al-Assad n’a plus aucune légitimité, dénonce Dai al-Chahal. Les salafistes libanais apportent un soutien moral, politique et financier au peuple syrien. Nous fournissons aussi de la nourriture, des médicaments ou des vêtements aux réfugiés. »
« Nous avons peur du Hezbollah«

L’imam radical Omar Bakri affirme être né à Beyrouth et n’avoir «jamais vu la Syrie de sa vie». De 1985 à 2005, il a vécu à Londres où il s’est rendu célèbre en qualifiant de «magnifiques» les auteurs des attentats du 11-Septembre.
Même barbe blanche, même quartier. Hassan al-Chahal est l’une des autres figures du mouvement. » Hafez al-Assad, comme son fils Bachar [de confession alaouite, une branche du chiisme, ndlr], ont très mal traité les sunnites, que ce soit au Liban ou en Syrie, dénonce-t-il. Sur 10 musulmans, il y a 9 sunnites en Syrie. C’est à nous de prendre le pouvoir ! »
Né au Liban en 1946, le courant salafiste, qui prône un retour à « l’islam des origines », s’organise autour d’une cinquantaine d’associations de charité et d’écoles religieuses, concentrées dans le nord du pays. Si leur mouvement reste d’ampleur limitée, les salafistes ont gagné en influence depuis l’assassinat de l’ancien Premier ministre Rafic Hariri et le retrait des forces syriennes du pays, en 2005.
Ils sont aussi fortement impliqués dans la vie politique : les salafistes sont « au cœur des tensions sectaires grandissantes entre sunnites et chiites », écrivait dès 2008 Omayma Abdel-Latif, alors experte au Centre Carnegie pour le Moyen-Orient.
A Qibbeh, un quartier pauvre situé à la périphérie de Tripoli, la prière se termine. À l’extérieur de la mosquée Hamza, une petite foule se rassemble derrière un pick-up où ont été entassés des haut-parleurs. Au centre du cortège, des Syriens qui disent avoir été victimes de la répression : l’un claudique sur ses béquilles, l’autre est en fauteuil roulant. Un troisième a le bras bandé.
Début août, ils ont été jusqu’à 700 à manifester en soutien aux opposants syriens. Ils ne sont plus que quelques dizaines à se mettre en marche, en scandant des slogans hostiles au président Assad. Tripoli, située à une quarantaine de kilomètres de la Syrie, est pourtant la deuxième ville du pays – et un véritable bastion sunnite. Lire le reste de cette entrée »