Proposer un temps de réflexion sous la forme d’un colloque Images et Politique est l’une des missions que se donnent les halles au sein du réseau européen Temps d’Images. Après la Palestine, nous abordons à présent Beyrouth, ville visible, meurtrie et détruite par quinze années de guerre civile et reconstruite de manière anarchique selon le seul plan des investisseurs ; et ville imaginaire, source de récits et de fictions. Ville visible et Ville imaginaire, les deux plans se rejoignent et se superposent entre destructions et tentatives de mémoire. Au cours de cette journée des questions seront posées à et par Beyrouth sous différents angles : architecture et urbanisme ; poésie ; littérature et engagement politique ; cinéma.
Beyrouth est la ville de l’Oubli.
À Beyrouth, on est le fils de rien, l’histoire n’existe pas à la différence du Caire, où l’on est toujours fils de Pharaon.
Beyrouth méconnaît son visage. Jamais la ville ne se regarde, ne se voit dans le miroir.
On parle toujours du droit à la mémoire, mais on ferait mieux de parler du droit à l’oubli.
On n’a rien à garder en mémoire, on ne peut mémoriser le passé de prospérité parce qu’à son point culminant, il y a eu la guerre civile. Ce n’est pas la peine de se rappeler ce qu’on a volontairement perdu, détruit. C’est pourquoi, cette continuité historique n’existe pas dans l’imaginaire beyrouthin. On est dans un présent permanent, pétrifié, figé. On est toujours dans le présent qui, quelque fois, est lourd. L’oubli allège les choses, on est plus léger avec l’oubli. On bouge et on se déplace très facilement avec l’oubli. Beyrouth, c’est Disneyland, une ville sans âge, sans histoire.Les vieilles maisons du centre-ville ont été repeintes, et ce n’est pas seulement l’oubli, c’est la légèreté non historique. Quelque chose qui n’a rien à voir avec le temps.
A Beyrouth, le temps n’existe pas.
D’une conversation entre Abbas Beydoun et Fabienne Verstraeten, Beyrouth, été 2009 Lire le reste de cette entrée »