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Exilé en France avec sa famille lors de la période troublée vécue par le Liban, Ibrahim Maalouf est issu d’une famille d’artistes : un grand-père poète, un père musicien, un oncle (Amin Maalouf) écrivain de renom, tout menait Ibrahim vers une carrière artistique et une liberté d’expression défendue par ses proches depuis toujours. Avec son nouvel opus Wind, il réalise un double rêve : celui d’écrire une musique de film et de rendre hommage à un des plus grands musiciens de jazz, Miles Davis, à sa manière, c’est-à-dire avec sa trompette quart de ton :
«C’est une trompette inventée au début des années 60 par mon père et qui permet de jouer de la musique arabe, grâce à un quatrième piston, ça ne s’était jamais fait avant, et pour la musique arabe, c’était une vraie révolution. Avec cet instrument, je me rends compte qu’il y a deux mondes qui se divisent : il y a ceux qui se passionnent pour cette trompette et qui me demandent de faire des choses avec eux et il y a ceux qui ont peur de ce genre d’instrument hybride : est-ce du jazz ou pas? Est-ce de la musique arabe ou pas? Alors qu’on s’en fout! Mon instrument est un enfant de deux cultures qui évolue dans son temps et qui n’a pas besoin d’être identifié à l’une ou l’autre de ces cultures.»
Et le jazz est une musique de métissage.
Je suis entièrement d’accord, c’est pour ça que je pense que les [fondamentalistes] du jazz se trompent. Il y a beaucoup de gens dans le milieu du jazz qui vont dire que ce n’est pas du jazz. Moi je ne dis pas [c’est pas du jazz], je dis que je ne sais pas. Quand Charlie Parker est arrivé, même lui disait que sa musique n’était pas du jazz alors que quelques décennies plus tard, on se rend à l’évidence : c’est du jazz ! Donc on ne sait pas comment les choses vont évoluer, ce qui est sûr, c’est que ceux qui rejettent le métissage se trompent.
Votre nouvel album est enregistré à New York dans la configuration d’un quintet de jazz.
Les circonstances ont fait qu’on a enregistré à New York, c’est parce que deux musiciens travaillaient là-bas et ne pouvaient se déplacer. Sinon, j’aurais aimé enregistrer à Paris, comme Miles pour [Ascenseur pour l’Échafaud]. Chacun d’entre nous dans le quintet a essayé d’être respectueux d’une écriture qui a été celle de Miles Davis et d’une certaine époque, mais à la fois chacun apporte une couleur très personnelle et moi la mienne à la trompette, c’est évidemment la couleur orientale. L’environnement jazz de l’album est plus le prétexte, le contenu est ailleurs.
Wind est le fruit d’une commande de la Cinémathèque Française pour créer une bande-son d’un film muet : pourquoi La Proie du Vent de René Clair datant de 1927 ?
Parce que beaucoup de choses me plaisaient : la notion de voyage d’abord, il s’agit d’un homme qui part d’un pays pour arriver dans un autre et vit une histoire d’amour, donc il y a aussi l’amour ; une sorte de schizophrénie amoureuse, un dédoublement de personnalité qui me fascine ; c’est un aviateur, il est donc dans le Lire le reste de cette entrée »
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