Télérama – Mathilde Blottière (image © DR)
Un documentaire rend hommage aux scientifiques qui, dans le Liban des années 60, ont conçu des fusées spatiales. Rencontre avec les beyrouthins Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, réalisateurs.
C’est l’histoire d’un petit pays qui, à l’orée des glorieuses sixties, a voulu conquérir les étoiles. Qui le sait ? Avant d’être systématiquement associé à la guerre, le Liban a lancé des fusées dans l’espace. Redécouvert par Joana Hadjithomas et Khalil Joreige, le projet, baptisé « The lebanese rocket society », a duré sept ans. Entre 1960 et 1967, sur fond de panarabisme et de course à l’espace entre les Etats-Unis et l’URSS, un professeur de mathématiques et ses étudiants zélés ont mis sur pied un véritable programme aéro-spatial. De cette aventure méconnue, le duo d’artistes libanais a fait un documentaire ovni, à la croisée de leurs activités de cinéastes et de plasticiens, sur le pouvoir de l’art, de la science et du rêve. Ils nous racontent la curieuse genèse de ce film où se télescopent passé, présent et avenir.
Retour aux sources : la pré-histoire
Au début était le hasard. En 2000, la sœur de Joana travaille sur un CD-Rom retraçant l’histoire du Liban. Au cours de ses recherches, elle a vent de la Lebanese rocket society. De leurs côtés, les cinéastes trouvent un timbre poste libanais à l’effigie d’une fusée en route vers la lune. Intrigués, ils décident d’entreprendre des recherches… « On a d’abord interrogé notre entourage, raconte Joana. Personne n’avait jamais entendu parler de ce projet. Les gens riaient, nous conseillant de ne pas perdre notre temps avec cette histoire aux airs de canular. Plus ils riaient plus on avait envie de persévérer…»
Des airs de canular, mais un projet scientifique sérieux
Dès 2001, le couple commence à prendre des notes, attentif au moindre indice. A ce stade, il ne sait presque rien, si ce n’est le nom de l’endroit où tout a commencé : l’université arménienne Haigazian, à Beyrouth. Une fois sur place, il plonge dans les archives et remonte quelques pépites : des images de fusées dans un fascicule, deux ou trois photos jaunies. Assez pour avoir la certitude qu’il ne s’agit pas d’une «blague », mais bien d’un projet scientifiquement sérieux. « Nous apprenons que, malgré l’intérêt de l’armée, ce programme s’est toujours voué à la recherche et à la paix. A nos yeux, c’est Lire le reste de cette entrée »