Par Pierre Benedetti – Media Part
Bombardée sans relâche par l’aviation israélienne durant la Guerre de 2006, cette banlieue sud de Beyrouth, où se situe le bastion du Hezbollah à Haret Hreik, a été reconstruite à la vitesse grand V. Grâce à l’injection de sommes faramineuses, le Parti de Dieu polit encore plus son image auprès d’une population libanaise qui se sent délaissée par le gouvernement et renforce ainsi ses ambitions politiques sur le terrain. Reportage.
« Regarde ! Tu vois cette allée ? Et bien, c’est le Hezbollah qui a tout rénové. Après la guerre, il n’y avait que des ruines. Mais, aujourd’hui grâce à eux, le quartier revit ». Mounir R.*, jeune Syrien d’Alep de 27 ans, a le regard qui change lorsqu’il évoque la renaissance de Dahiyeh, banlieue chiite de la capitale, et de Haret Hreik, son centre névralgique qu’il côtoie depuis sept ans. Il est reconnaissant, fier des 400 millions de dollars investis pour panser les plaies de ces quelque 262 immeubles anéantis. Commerces, magasins… 25 000 au total soufflés de la carte, trois ans et demi plus tôt (1). À l’époque, Tsahal cherchait à éradiquer les caches d’armes – surestimées ? – et à détruire les réseaux sousterrains dont personne ne pouvait soupçonner l’étendue. Pilonnage en règle. Que des pertes matérielles, « aucun cadre du parti est mort », selon le Hezbollah. Le doigt de Mounir R., qui balaie le paysage, s’arrête sur un moignon de building à moitié décharné. Comme les 150 autres du quartier, dont une cinquantaine, trop abîmés, devront être rasés : « Nous avons souffert. Et Al hamdoulillah (merci à Dieu), Dahiyeh s’est relevé. »
Derrière lui, au milieu des façades lézardées et du tohu-bohu incessant d’un après-midi hivernal de mars, le bruit des grues et des travaux a remplacé le bourdonnement des 942 bombes lâchées par Israël*. Sur les affiches essaimées un peu partout, notamment aux alentours des chantiers restants, où gisent des immeubles ensevelis sous des tonnes de poussière grisâtre, de fils électriques dépecés et de verre éclaté, le message est clair :« Dahiyeh sera plus belle qu’avant ». Le leader chiite Hassan Nasrallah avait insisté sur le fait qu’« il n’y aurait pas de « victoire divine » (nom de l’opération de résistance) sans reconstruction », lors de son discours du 14 août 2006. Une date qui marque la fin de la guerre, durant laquelle des milliers d’habitants fuirent leur domicile et trouvent refuge – par exemple – à Baada, un faubourg cossu peuplé de chrétiens maronites, tandis que les plus téméraires, en restant sur place, narguent la mort et snobent les dépliants de mise en garde annonçant la pluie des obus, déversés depuis les airs par Israël.
Près de 240 immeubles reconstruits
Assis le scooter – bon pour la ferraille -, qui lui sert d’outil de travail en tant que livreur chez Durée Resto et Subway, Mounir R. sillonne les rues embouteillées de cette zone habitée par plus de 700 000 personnes. Pour me démontrer l’ampleur des travaux, l’étudiant en comptabilité, à la longue chevelure brune, décide de se rendre (m’amener) à Lire le reste de cette entrée »