Entretien avec Guy Spitaels, ministre d’Etat belge et professeur honoraire à l’Université libre de Bruxelles, auteur de « Obama président : la méprise » (Ed. Luc Pire).
Pour Guy Spitaels, les deux candidats aux présidentielles américaines voulaient l’un comme l’autre maintenir la domination mondiale des Etats-Unis, leurs différences se marquant essentiellement au niveau de la tactique, unilatéraliste chez McCain et plutôt multilatéraliste chez Obama. Selon ses propres dires, le 44e président des Etats-Unis entend jouer le rôle de shérif du monde. Guy Spitaels, répond aux questions de Pascal Boniface, directeur de l’IRIS.
Pascal Boniface : Comme développé dans votre livre « Obama Président : la méprise », pourquoi ne vous attendez-vous pas un changement radical de la part de la politique étrangère américaine ?
Guy Spitaels : Oui, c’est le cœur du propos : la méprise ne se porte pas sur la personnalité d’Obama. Je suis en effet, comme chacun, séduit par ses qualités, son charisme, la maîtrise dont il a fait preuve pendant toute la campagne, la sagesse qui décevra peut-être d’aucuns mais qui est réelle dans la composition de son équipe. Le problème n’est pas là, la méprise est double au fond. Certains voudraient voir en Obama le porteur de leurs inspirations pour le Tiers-Monde, pour l’environnement, pour une nouvelle reconstruction des Nations-Unies. Ce sont des objectifs extrêmement louables, mais il faut davantage s’attendre au principe d’« America first ».
La première méprise dont pourraient être victimes les Européens, c’est donc de ne pas voir, comme avec tous les Présidents américains, qu’il agira légitimement – évidemment – pour défendre les intérêts de ces concitoyens. La seconde méprise réside dans ses conceptions pour ce faire, celles qu’il entretient de son pays. Et là il me semble qu’il n’y a pas de doute. Dans son livre, maintenant traduit, “Change We Can Believe in”, il disait déjà que les Etats-Unis devaient être un shérif, mais le problème était que le shérif au pouvoir était un mauvais shérif. Il a repris ce thème d’une certaine manière dans son article remarqué de Foreign Affairs, au début de sa campagne, où il disait qu’il essaierait certes de dialoguer avec les puissances ennemies et d’autres, mais que si cela était nécessaire, il agirait unilatéralement. C’est ainsi, me semble-t-il, qu’il voit les choses. Son discours inaugural n’a fait que confirmer ce propos : « We are ready to lead once more ». Mais je ne sais pas si ce leadership est la fonction qu’un certain nombre d’habitants de la planète attendent des Etats-Unis. Qu’en pense-t-on en Chine, dans le monde musulman, en Russie ? Lire le reste de cette entrée »