L’Orient le Jour
Par Khalil FLEYHANE
C’est un couple banal de Libanais, comme des milliers d’autres qui retournent des États-Unis à Beyrouth, avec leur nourrisson, par le biais de l’Aéroport de Detroit. Un contrôleur zélé, sans doute soucieux de servir son pays de son mieux sans aucune autre considération morale ou rationnelle, confisque le biberon du bébé sous les yeux des parents horrifiés et le jette aux poubelles de la douane. Explications de l’agent de sécurité : « Le produit qu’il voit sous ses yeux pourrait bien être de la matière explosive… »
Ce genre d’incident se multiplie à outrance depuis qu’un certain Nigérian de 23 ans, Umar Farouk Abdulmutallab, a tenté le 25 décembre dernier de faire exploser l’avion assurant le vol 253 de Northwest Airlines en provenance d’Amsterdam, à l’aide d’explosifs dissimulés sous ses vêtements, peu avant l’atterrissage à Detroit. Comme des millions de Libanais à travers le monde, ce couple et leur nourrisson n’ont plus le droit à l’anonymat ou à la banalité. Ils sont coupables d’un « crime terrible », qui en fait des suspects potentiels d’« activités terroristes » : celui d’être originaires du Liban.
Cent pour cent des passagers en provenance de quatre pays, dont le pays du Cèdre, notamment des ressortissants américains nés au Liban ou des Libanais qui possèdent le passeport américain ou européen depuis plusieurs générations, sont en effet fouillés systématiquement, c’est-à-dire soumis à une fouille corporelle « complète », ainsi qu’à une inspection « manuelle » de leurs effets personnels, conformément aux directives de l’administration de la sécurité dans les transports.
Ainsi, un ancien ministre et diplomate libanais, qui retournait à Beyrouth après avoir participé aux travaux de l’Assemblée générale de l’ONU, a-t-il lui aussi été fouillé de fond en comble. Muni d’un passeport diplomatique, cet ancien responsable a aussitôt fait valoir ses droits auprès des instances sécuritaires de l’Aéroport John F. Kennedy, ne s’attirant, pour toute réponse, qu’un commentaire dédaigneux de ces dernières.
S’il est naturel que les États-Unis prennent toutes les mesures nécessaires pour combattre le terrorisme, la question reste de savoir pour quelles raisons les ressortissants libanais ou d’origine libanaise, dont plusieurs milliers vivent, travaillent ou se rendent couramment sur le territoire américain, sont-ils dans la ligne de mire des autorités US. Question plus lancinante encore : pourquoi n’y a-t-il aucune réaction dans les milieux officiels libanais par rapport à ces mesures excessives ? D’autant que les visas américains sont octroyés par l’ambassade américaine à Awkar au terme d’un contrôle particulièrement sévère des demandeurs, notamment par l’aile sécuritaire de l’ambassade, ainsi qu’à Washington même. Sans oublier le fait que les responsables américains se rendent couramment au Liban sans qu’aucun incident n’ait été signalé à leur encontre durant ces dernières années – alors même que le périmètre de l’Aéroport international de Beyrouth est sous le contrôle du Hezbollah – et que l’AIB n’a connu aucun incident sécuritaire depuis au moins deux décennies.
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