Le Conseil des Ministres approuve la proposition de loi électorale basée sur la proportionnelle
Posted by dodzi sur août 8, 2012
C’était une séance fructueuse qui a eu lieu hier au siège du Conseil des Ministres. Parmi les points les plus importants: la discussion et l’approbation de la proposition de la nouvelle loi électorale basée sur la proportionnelle. Le débat tournait notamment autour de la taille des circonscriptions, plutôt que sur le système à implémenter – la proportionnelle ou la majoritaire à taille réduite. Au final, un compromis a permis à une nouvelle proposition de loi de naître: 13 circonscriptions de taille moyenne. Bien qu’approuvée par le Conseil des Ministres, la proposition de loi doit encore passer par l’Assemblée Nationale. Dans l’opposition, on cite déjà un projet mort-né.
Les circonscriptions sont réparties comme suit:
Liban Nord:
– Akkar-Minieh-Donniyeh: 10 sièges
– Tripoli: 8 sièges
– Zghorta-Bcharreh-Koura-Batroun: 10 sièges
Mont Liban:
– Kesrouan-Jbeil: 8 sièges
– Baabda-Matn: 14 sièges
– Aley-Chouf: 13 sièges
Beyrouth:
– Achrafieh-Rmeil-Saïfi-Bachoura: 9 sièges
– Ras-Beyrouth-Mreisseh-Minet el Hosn-Zouqak el Blat- Mazraa-Msaitbeh: 10 sièges
Liban-Sud:
– Jezzine-Saïda-Zahrani-Tyr: 12 sièges
– Nabatiyeh-Marjeyoun-Hasbaya-Bint Jbeil: 11 sièges
Bekaa:
– Baalbak-Hermel: 10 sièges
– Zahle: 7 sièges
– Bekaa-Ouest-Rachaya: 6 sièges
Expatriés: 6 sièges
Un pas vers l’avant, malgré certaines irrégularités
D’après nos analyses, la loi électorale proposée met certains arrangements en question: pourquoi une telle différence de taille entre les districts de Baabda-Matn (14 sièges) et de Bekaa-Ouest (6 sièges)? En effet, il était possible de réarranger les districts existant tout en évitant une telle divergence de taille entre le plus grand et le plus petit district. Pour comprendre, il s’agit de deux districts ayant de nombreuses minorités. Mais en allouant à un district 14 sièges et à un autre que 6, le système risque de soutenir les petits groupes (partis politiques ou communautés) dans l’un, et de les discriminer dans l’autre. En effet, afin d’obtenir un siège à Baabda-Matn, il ne faudra obtenir qu’un minimum de 7,14% des voix, alors qu’il faudra obtenir un minimum de 16,66% des voix à Bekaa-Ouest.
Or les communautés druzes et chiites ne représente que 14% de la population de Bekaa-Ouest chacune. Insuffisant pour faire élire un représentant par eux-même. Une répartition proportionnelle des communautés dans un district permet donc de faire élire plus de députés que dans un autre.
L’ouverture du débat et l’action qui s’en est suivie en faveur de la proportionnelle constitue néanmoins un pas dans la bonne direction. Le système offre une meilleure représentativité des minorités dans les grands districts, permet l’accès au Parlement pour les petits et moyens partis, et permet au long terme de sortir du système confessionnel.
Vous pouvez lire notre analyse détaillée permettant de mieux comprendre le système.
De plus, la loi électorale fait une avancée supplémentaire vers plus de démocratie, en allouant un quota de 10% pour les femmes. On est bien loin des 30% suggérés par certains progressistes, mais il s’agit d’une première au Liban. Les expatriés pourront également bénéficier du droit de vote dans les ambassades et les consulats. 6 sièges, 3 chrétiens et 3 musulmans ont été ajouté pour ceux-ci, portant à 134 le nombre total de députés au Parlement. Plus encore, les militaires auront pour la première fois le droit de vote en 2013.
D’autres réformes aux aspects plus techniques ont également été apportés. Citons entre autre plus de facilités pour les handicapés.
Un compromis pour satisfaire Joumblatt
La source de la différence de taille entre les districts peut trouver sa source dans le fait que la taille des circonscriptions est née d’un compromis. En effet, afin de mieux satisfaire M. Joumblatt et la communauté druze, le gouvernement a décidé de placer Aley et Chouf dans une même circonscription, renforçant donc le pouvoir de la communauté druze. M. Joumblatt, ainsi que son bloc de députés et ses ministres au gouvernement, on dès le début des discussions catégoriquement rejeté le système proportionnel dans son ensemble.
Celui-ci affaiblit en effet le pouvoir du Parti Socialiste Progressite, qui jusqu’aujourd’hui, maintenait une hégémonie sur les districts de Aley et du Chouf, nommant la majorité des 13 sièges dans ces districts, et offrant le reste à leurs alliés. De même, une alliance avec Hariri dans la Bekaa-Ouest permettait à Joumblatt d’obtenir des sièges supplémentaires, malgré sa maigre influence dans cette région.
L’opposition rejette d’emblée
Il n’a pas fallu longtemps pour les membres principaux de l’opposition de rejeter la proposition de loi, l’accusant tantôt d’avoir pour objectif d’affaiblir l’influence de Hariri, et tantôt de renforcer celle du Hezbollah.
Le plus étrange cependant, est la réaction du parti Kataëb et des Forces Libanaises. Ces deux partis pourront bénéficier d’un plus grand nombre de sièges qu’ils en ont actuellement, puisque la proportionnelle renforce l’influence chrétienne à Akkar, au Sud, et au Chouf. Les Kataëb, qui depuis 2005 se disent centristes et indépendants, libérés de leurs alliances au sein du 14 mars, montrent encore une fois leur mauvaise foi vis-à-vis du progrès démocratique.
Il faut toutefois comprendre que le parti Kataëb craint plus une victoire de l’alliance CPL-Hezbollah en 2013, qu’ils ne souhaitent avoir plus de sièges au Parlement.
Un vote difficile prévu au Parlement
Une fois passée par le Conseil des Ministre, la proposition de loi est envoyée à l’Assemblée Nationale, qui discutera du projet, proposera des changements, ou votera en faveur ou contre le projet.
Le projet nécessite d’une majorité simple au Parlement afin d’être approuvée. La majorité étant handicapée du vote joumblattiste, devra recouvrer des voix au sein de l’opposition. Si l’on considère que le CPL, le Hezbollah, le mouvement Amal, et les proches du Premier Ministre Najib Mikati voteront en faveur du projet, celui-ci obtiendrait 60 votes. Il reste donc un minimum de 5 voix à chercher au sein des membres de l’opposition. Bien que certains partis rejettent d’hors et déjà le projet, malgré les avantages que celui-ci leur procure, la loi risque d’être rejetée par la majorité des membres.
Il faut noter néanmoins, que l’absence de certains membres de l’opposition permettrait de remettre le projet sur les rails!
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