Raï entame une tournée au Canada
Posted by jeunempl sur mai 6, 2012
(Fady Noun – L’Orient le Jour)
C’est en rangs dispersés que les Libanais accueillent le patriarche Béchara Raï au Canada, certains cercles maronites ayant décidé de bouder la visite (note du MPLBelgique.org : en fait, une partie des frustrés des Forces Libanaises). La Fondation maronite dans le monde fait tout pour en assurer le succès.
Difficile visite que celle qu’entame le patriarche maronite, Mgr Béchara Raï, aujourd’hui, au Canada, et changement complet de paysage par rapport à celui du Mexique, qu’il vient de quitter. Un peu comme les États-Unis, le Canada n’est pas un pays, mais un continent. Mais contrairement aux États-Unis ou au Mexique, l’émigration libanaise y est récente. Elle est étroitement liée à la guerre de 1975, qui a poussé à l’exode des milliers de familles libanaises ayant d’abord atterri à Chypre, et qui, de guerre lasse, ont fini par gagner le Canada, qui n’a pas boudé cet afflux. Les Libanais en général et les maronites en particulier se sont principalement installés à Montréal et dans la province francophone du Québec. Ils y ont édifié un petit Liban sans coupures d’électricité, mais aussi sans la chaleur humaine qui fait notre différence. On y trouve tout, du pain blanc aux feuilles de vigne farcies, mais pas la famille.
Bien intégrés ? Oui et non. Certains ont pris leur parti et ont résolument tourné le dos au Liban. « Bonjour Monsieur, au revoir Monsieur. » Toute la politesse du Canada se sent dans leurs manières. Mais cette politesse même, avec un compatriote, est le signe que la coupure est définitive, que la distance est prise. Avec Marc Diab, le Canada d’origine libanaise a donné son premier soldat tombé – en Afghanistan – dans l’exercice de son devoir militaire envers son pays. Suprême preuve d’intégration.
D’autres sont moins sûrs de leur fait. Ils ne regrettent rien sans doute, mais leur amour pour le Liban et ce qu’est le Liban – à la fois plus qu’un pays et moins qu’un pays – est resté. Ils y viennent une fois par an et s’y attardent volontiers, surtout les longs mois d’hiver où on ne peut pas mettre le nez dehors au Canada. Certains même choisissent, joyeusement, de rentrer, avec le sentiment qu’ils ont fait leur devoir à l’égard de leurs sentiments d’angoisse, qu’ils n’ont abandonnés que pour une autre aliénation.
C’est donc dans des conditions difficiles et avec des moyens de fortune que l’Église maronite, assistée des ordres religieux masculins et féminins, tente de préserver « l’héritage antiochien » en ce Grand Nord où les températures peuvent tomber, durant les rigoureux mois d’hiver, à moins quarante degrés. Les vocations locales sont inexistantes, non seulement parmi les maronites, mais même au niveau de l’Église catholique dans son ensemble. Une révolution tranquille a dépeuplé, dans les années 60, les bancs des églises, qui ne sont plus fréquentées que par les têtes blanches. Parfois, celles-là mêmes qui ont contribué, 40 ou 30 ans plus tôt, à ensabler la fontaine d’eau vive. Le sécularisme et une campagne savamment orchestrée par les médias sont passés par là et veillent à ce que ce sentier étroit mais sûr reste embroussaillé, dans l’espoir que les grandes routes de la consommation le fassent oublier une fois pour toutes.
Dans un confort matériel acceptable, mais sans commune mesure avec celui du Liban, l’Église maronite au Canada cherche à accomplir sa tâche. Mgr Joseph Khoury, l’actuel évêque maronite du Canada, se plaint de n’avoir même pas de vicaire pour l’assister dans les tâches de représentation et le travail administratif. Il insiste aussi sur la question des distances qui séparent les paroisses et les paroissiens maronites les uns des autres. Les prêtres sont en sous-nombre. Mgr Khoury dispose d’une dizaine de prêtres diocésains pour tout le Canada et coordonne leurs services pastoraux avec l’ordre religieux des antonins et l’ordre maronite libanais, présents au Canada. Les mariamites, eux, ont quitté ces terres inconfortables, frappés de plein fouet par la crise des vocations. L’Église latine a pris la relève en de nombreux endroits.
Discrètement mais efficacement assisté par la Fondation maronite dans le monde de Michel Eddé, le patriarche Raï entame donc une visite pastorale de huit jours (5-13 mai) au cours de laquelle il visitera les principales paroisses maronites du Canada francophone et anglophone. Toutefois, le chef de l’Église maronite ne se rendra pas à Vancouver, sur la côte ouest du pays, où il n’existe pas encore de paroisse. La ville d’Edmonton, à trois fuseaux horaires de Montréal, est l’étape la plus occidentale de son périple. Les grandes villes de Toronto, de Halifax et d’Ottawa ne seront bien évidemment pas oubliées. À Ottawa, une visite au Parlement et des rencontres officielles sont prévues. Nominations administratives obligent, et en attendant que le Conseil des ministres se décide à nommer un ambassadeur, c’est le chargé d’affaires de l’ambassade Georges Abouzeid qui accueillera le patriarche au nom du Liban.
La petite politique libanaise s’est bien entendu invitée à la tournée. Comme si le Liban n’était pas suffisamment affaibli comme ça, les susceptibilités de l’heure seront au rendez-vous de la visite. En effet, le patriarche a donné son accord pour une rencontre dimanche matin avec les représentants des communautés libanaises chiite, sunnite et druze au Canada, ce qui a froissé des cercles politisés au sein de la communauté maronite, qui ont décidé, en réaction à cette décision, de boycotter la visite du patriarche, pour ce que cela veut dire… Car, de toute façon, l’impact de ce mouvement d’humeur restera limité. Pour leur part, les organisateurs de la visite y voient un affaiblissement du témoignage que le Liban peut et doit apporter devant la communauté internationale en général et les autorités du Canada en particulier.
Souhail Chalouhi said
Contrairement à ce que certains médias ont vehiculé, la visite du Patriarche au Cadana était plus que triomphale tous les libanais ont acclamés le Patriarche Raii, 2000 personnes à la messe à la préstigieuse Basilique Saint _josephe de Mont-Royal, 1500 à la messe à Saint-Maron et 1000 personnes au diner d’adieu à Montréal.