Chekka s’interroge sur son environnement
Posted by jeunempl sur septembre 16, 2010
Nadine Chalak – Les Hirondelles
Malgré la construction d’infrastructures routières, l’implantation d’arbres dans la région ou les opérations portes ouvertes, l’impact des cimenteries sur l’environnement reste difficile à évaluer.
Les polémiques autour des grandes cimenteries se multiplient. Pollution des eaux ou atmosphérique, paysages défigurés… La liste est longue pour ce domaine d’activité dont dépend pourtant une bonne part de l’activité économique du pays, avec le développement du secteur du bâtiment. Dans la région de Chekka, la société suisse Holcim fait partie du paysage depuis longtemps. Suivant la politique du groupe mondial, Holcim-Liban met en avant, dans sa communication d’entreprise, sa volonté d’être un acteur positif en terme de développement durable. Pourtant, dans les communes environnantes, la colère est parfois vive à l’égard du géant du ciment. Plusieurs militants écologistes, ayant requis l’anonymat, accusent cette société d’utiliser un type de petroleum coke, en guise de carburant (un dérivé du pétrole dont le taux en souffre maximum est fixé très strictement par l’Etat libanais), ne répondant pas aux normes en vigueur. Mais les activistes ne sont pas les seuls à faire entendre leur voix, les simples citoyens aussi, persuadés que le cimentier a brûlé durant plusieurs années des déchets, de la tourbe ou des pneus en guise de carburant, afin de réduire ses coûts de production.
Chez Holcim, on rejette ces accusations. Le coordinateur de la sécurité et de l’environnement, Rodi Abou Nakkoul, reconnaît que sa société utilise bien le petroleum coke pour les obligations de production, mais peu souvent et en quantité très faibles. Selon lui, les produits utilisés par Holcim répondent tous aux normes fixées par l’Etat, avec un taux de souffre inférieur à 4,5%. Abou Nakhoul se félicite par ailleurs de l’obtention par Holcim du label ISO 14001, certifiant que l’usine respecte bien des standards internationaux en matière de respect de l’environnement.
Parmi les détracteurs de Holcim, Rafaat Saba est l’un des plus actifs. Directeur de l’organisation Protection de l’environnement et du patrimoine (PEP) et de l’Association libanaise de la protection de l’environnement (ALPE), cet ingénieur se bat sur plusieurs fronts. Concernant l’utilisation de dérivés du pétrole interdits, il reprend les accusations à son compte: «Plusieurs organisations non gouvernementales ont réclamé en vain l’utilisation de produits alternatifs à
ces petroleum coke, comme la sciure de bois. Ou au moins des petroleum coke aux taux inférieurs à 4,5% en souffre. » Pour sensibiliser tous les acteurs de la région à cette question, ses associations ont distribué des notes d’orientation. Et Saba enfonce le clou, affirmant qu’une mission d’USaid à la Lebanese American University a réalisé, en 2004, des analyses afin d’avoir des données chiffrées sur l’impact écologique des grandes industries de la région. «Pour certains produits nocifs, les taux observés étaient dix fois supérieurs à la normale», assure l’ingénieur.
Les poussières en question
Mais Saba bataille également sur un front bien concret, celui des émissions de poussières par la cimenterie, surtout la nuit. «Nous ne demandons évidemment pas la fermeture de la cimenterie qui est un acteur économique majeur dans la région, souligne-t-il. Mais en revanche, nous demandons avec force de trouver une solution concernant la poussière émise en permanence.» Là aussi, Abou Nakkoul assure suivre à la lettre sa feuille de route environnementale: «Notre objectif premier est de respecter la loi libanaise qui exige que l’émission de poussière émanant des cheminées ne dépasse 100mg/Nm³ (le «normal mètre cube» est une unité de mesure de quantité de gaz correspond au contenu d’un volume d’un mètre cube)».
De plus, ce dernier rappelle que le fait de faire partie d’une multinationale comme le groupe Holcim implique même de respecter des taux d’émission de poussières plus faibles que la moyenne: «Nous avons investi dans l’environnement 10 millions de dollars sur cinq ans, simplement pour améliorer notre action en matière de respect de l’environnement.
Cette année, nous avons même changé nos objectifs pour être cohérent avec ceux du groupe Holcim International qui nous a demandé d’avoir une moyenne en dessous de 10mg/Nm³, c’est-à-dire 10 fois moins que les normes imposées au Liban, ce qui est très comparable aux émissions dans les pays européens». Carburants, poussières… En l’absence d’expertise indépendante, cette polémique sur les risques encourus par la population pourrait durer encore longtemps.
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