La grande pagaille des bus : Efficaces avant la guerre, les transports en commun attendent leur renaissance
Posted by jeunempl sur août 22, 2010
Marzena Zielinska-Schemaly – Les Hirondelles
Dora, 8h du matin. Avec ses embouteillages et son nuage de pollution, la capitale libanaise souffre des inconvénients des grandes métropoles mondiales. Ces dernières ont parfois choisi des solutions radicales: une taxe pour conduire dans le centre-ville à Londres ou la circulation alternée à Milan. Et toutes misent également sur l’amélioration et la promotion des transports en commun.
Mais Beyrouth n’est ni Milan, ni Londres. Les déplacements reposent ici sur l’armada de taxis services et de minibus, sans itinéraire fixe, s’arrêtant n’importe où sans se soucier des autres véhicules. Et ceux-ci imposent même leur loi. «Nous avons été obligés de supprimer la ligne de bus nº4 car les minibus privés de Dahieh ne nous permettait plus de circuler», explique Kassem Abboud, directeur des opérations de la LCC (Lebanese Commuting Company). Une anecdote symptomatique de l’anarchie régissant aujourd’hui les transports en commun.
Le privé contre le public
Ces derniers n’en sont pas arrivés là en un jour. La guerre de 1975-1990 a totalement désorganisé les transports publics libanais. «Jadis, l’Office du chemin de fer et du transport en commun (OCFTC) était l’un des services publics les plus profitables. Mais en 1975, un seul des 138 bus a continué de rouler», se souvient Raymond Felefly, président du Syndicat des employés du transport en commun. Ensuite, les bus achetés en 1982 ont été détruits lors l’invasion israélienne. A la fin de la guerre, seuls 30 véhicules sillonnaient la ville.
En 1995, la LCC, une compagnie privée, démarre ses activités avec 25 véhicules et compte, fin 1996, 189 bus. Son réseau de bus rouges est certes efficace, mais surtout très polluants. En 1997, le gouvernement valide l’achat de 200 bus en faveur de l’OCFTC… qui reposent en paix depuis longtemps à Mar Mikhaël. Une acquisition dénuée de sens, les véhicules choisis étant inadaptés aux conditions climatiques libanaises. Trois ans plus tard, le puzzle se complique, avec le don de 37 bus par les Émirats arabes unis.
«Le Conseil des ministres a promulgué le décret nº27 du 19 août 2004 prévoyant d’acheter 250 bus pour l’OCFTC et de créer 50 lignes», explique Raymond Felefly. «Mais jusqu’aujourd’hui, il n’y a pas de volonté politique d’exécuter cette décision et de faire revivre le transport public», regrette-t-il. L’OCFTC possède maintenant 5 bus en état de marche, et 280 conducteurs. Parallèlement, le concurrent privé est en train de changer sa flottille devenue trop polluante. «Nous venons de mettre en service 32 bus flambant neufs, qui servent aux étudiants de l’Université arabe», souligne Abboud de la LCC. La même LCC qui, elle, manque de conducteurs…
Conscient des dysfonctionnements actuels, le ministre des Transports, Ghazi Aridi, a d’ailleurs présenté au Conseil des ministres, il y a six mois, un projet détaillé pour améliorer la situation des transports en commun, en commençant par appliquer la décret de 2004. Mais jusqu’à maintenant, aucune décision n’a été prise.
CDR vs. Travaux publics et Transports
Le Conseil de développement et de reconstruction (CDR) et le ministère des Travaux publics et des Transports sont loin de faire chambre commune. Au coeur des litiges, la maintenance des travaux effectués et le contrôle des projets du CDR.
«Le CDR termine son travail et ne touche plus à rien, assure Ghazi Aridi, ministre des Transports. Je vous le dis clairement: je n’ai pas confiance dans le CDR». De son côté, Elie Hélou, expert en transports pour le CDR, remarque que son «rôle est l’ingénierie et non l’entretien» des projets qu’ils reçoivent du gouvernement.
Ces institutions se renvoient la balle quant aux responsabilités de l’état actuel du transport au Liban, cachant peut-être, en second plan, une bataille financière.
Selon son site internet, «tous les dossiers relatifs aux projets de la ville de Beyrouth et l’échelle du pays ont été transféré au CDR».
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