Kamel el-Assaad, une grande figure de la politique libanaise
Posted by jeunempl sur juillet 27, 2010
(L’Orient le Jour)
Le Liban a perdu hier une des figures politiques qui ont marqué son histoire contemporaine, l’ancien président du Parlement Kamel el-Assaad. Les funérailles officielles et populaires auront lieu demain.
C’est à l’aube du dimanche 25 juillet que Kamel el-Assaad, 82 ans, a rendu son dernier soupir, après une longue lutte contre la maladie. Sa famille a annoncé la nouvelle dans la matinée d’hier. Il avait six enfants : Ahmad (président du mouvement de l’Option libanaise), Imane et Maha, d’un premier mariage avec Ghada el-Khansa, et Khalil, Abdel-Latif et Waël d’un second mariage avec Lina Saad. Il sera inhumé, conformément à ses dernières volontés, au sanctuaire de Sayyida Zeinab en Syrie, où sa mère est enterrée.
La direction du protocole au Parlement a aussitôt décrété le deuil national durant trois jours à partir de mardi, au cours desquels les drapeaux seront mis en berne et les médias seront appelés à ne pas diffuser des programmes de variétés. Elle a également publié le programme de la journée de mardi. Le convoi quittera le domicile du défunt à Tallet el-Khayat vers 10h30, pour se diriger vers le sanctuaire à Damas, où la prière et l’inhumation auront lieu. Dans le convoi, les motards, les équipes de scouts, les porteurs de couronnes, les porteurs des décorations, membres de la police du Parlement, et les hommes religieux précéderont le cercueil, qui sera suivi des officiels et des autres participants aux funérailles. Deux détachements des Forces de sécurité intérieure (FSI) accompagneront le convoi à partir du domicile du défunt jusqu’au sanctuaire. Jusqu’à demain, des officiers se relayeront quatre par quatre pour garder sa dépouille.
Les condoléances
Les condoléances seront reçues par la famille aujourd’hui et mercredi au domicile du défunt à Tallet el-Khayat, près de Télé-Liban, immeuble al-Khalidi, puis jeudi et vendredi au domicile de son fils Ahmad à Hazmieh, Mar Takla, face à l’ambassade de Tunisie, immeuble Jean Mikhael.
Dès l’annonce du décès, des hommages ont été rendus à l’ancien président de la Chambre des députés. L’actuel président Nabih Berry a présenté ses condoléances en son nom et au nom du peuple libanais. L’ancien président du Parlement Hussein Husseini a salué en Kamel el-Assaad « un homme qui, qu’on adhère à ses positions ou pas, et en toutes circonstances, avait toujours la stature d’un homme d’État, de ceux qui faisaient preuve de patience dans la pratique de la démocratie parlementaire ». « Avec sa mort, le Liban perd un de ses grands hommes », a-t-il conclu.
De son côté, le vice-président du Conseil supérieur chiite, cheikh Abdel Amir Kabalan, a déploré la mort d’un homme « qui a passé le plus clair de sa vie dans le service public ». « Il était un des hommes politiques qui se caractérisaient par leur ouverture et leur sens de la coopération dans l’intérêt du pays, a-t-il poursuivi. Le défunt était un grand homme patriotique, qui a pris des positions fermes pour défendre les causes nationales, Israël étant son seul ennemi. Son principal souci était de préserver l’unité nationale, l’indépendance et la stabilité du pays. »
Le député Nadim Gemayel, après une visite au domicile du défunt dans l’après-midi, s’est dit « attristé par la perte de l’un des plus grands hommes politiques du Liban, qui a joué un rôle crucial dans sa vie politique par ses prises de position courageuses ». Il a salué « le rôle essentiel qu’il a joué au cours des élections présidentielles de 1982, qui avaient porté Bachir Gemayel à la présidence ».
Kamel el-Assaad est né en 1928, dans le village de Taybeh, Marjeyoun, dans une grande famille féodale chiite, une appartenance dont il paiera plus tard le prix, à la montée des partis et mouvements chiites armés. Son père Ahmad el-Assaad a été président du Parlement.
Kamel el-Assaad a fait ses études scolaires à l’école de La Sagesse, puis a décroché un diplôme en droit et sciences politiques de l’Université de la Sorbonne à Paris, en 1952. C’est âgé d’à peine 25 ans, en 1953, qu’il entre pour la première fois à l’Hémicycle, en tant que député de Marjeyoun. Il le sera sans discontinuer durant 39 ans, puisqu’il sera réélu en 1957, en 1964, en 1968 puis en 1972 à la Chambre des députés et restera en place jusqu’en 1992 en raison de la guerre civile. Kamel el-Assaad a été président du Parlement à plusieurs reprises, en 1964 et en 1968, puis 14 années consécutives, de 1970 à 1984. Il a présidé trois séances d’élection de présidents de la République, Élias Sarkis, Bachir Gemayel et Amine Gemayel, durant la guerre et dans des conditions délicates. Il a également été ministre de l’Éducation de 1961 à 1964, dans le gouvernement de Rachid Karamé, et ministre des Ressources hydrauliques et électriques du 10 avril au 2 septembre 1966, dans le gouvernement de Abdallah el-Yafi.
Kamel el-Assaad avait fondé en 1970 le Parti social démocrate, centriste, considéré comme étant un des facteurs qui ont porté le président Sleimane Frangié au pouvoir. Il a souvent été vu comme un des supports du camp chrétien, ce qui explique l’enthousiasme dont il a fait preuve pour l’élection de Bachir Gemayel, à la caserne de Fayadiyé en 1982. Mais c’est aussi de cette élection que vient le divorce avec les autorités syriennes, auxquelles il avait dit alors : « Entre le vide constitutionnel et l’élection de Bachir Gemayel, je préfère la seconde option. » Cette tension avec la Syrie sera la cause directe de son départ du perchoir en 1984 (avant Taëf, le président du Parlement était élu chaque année), perdant l’élection en faveur de Hussein Husseini, dans la foulée de la révocation de l’accord du 17 Mai.
La vie de Kamel el-Assaad n’aura pas été exempte de violence et de dangers. Son domicile de Taybeh a été attaqué une première fois par les Palestiniens, avant d’être totalement détruit par l’aviation israélienne. En 1989, il a boycotté les réunions de l’accord de Taëf. Dans un contexte de tensions avec le mouvement Amal et le Hezbollah, il a échoué aux élections de 1992, de 1996 et de 2000, a appelé au boycott des élections de 2005 et ne s’est pas présenté en 2009.
Kamel el-Assaad a succombé à la maladie après une longue lutte. Lors de l’une de ses dernières apparitions en public en 2005, il a perdu conscience alors qu’il s’adressait à la foule. Il restera dans les mémoires, notamment pour ses prises de position courageuses. En 2002, il avait déclaré que « du jour au lendemain, la société, qui était démocratique au Liban, s’est transformée en une société gouvernée par la force et la contrainte ». Plus tôt, en 2001, il n’avait pas hésité à dire que « le Liban souffre de la tutelle syrienne arbitraire », dénonçant, la même année, « l’État policier libano-
syrien ». Il a souvent remis en cause le déroulement des élections dans sa région, au Liban-Sud, mais a aussi mis en garde contre « les pièges israéliens », dans une déclaration datant de 2000.
KOCH said
Cher(e)s Ami(e)s,
Soyez aimable de transmettre mes sincères et profondes condolèances à la famille de Monsieur Kamel El-Assad.
Disparaît aussi un fier représentant du Liban traditionnel que me narrait la famille et un juriste francophone axé sur la négociation.
Notre culture commune est en deuil.
Puisse Dieu reconnaître « ce bon père de famille ».
J.P. KOCH
membre de l’Association Française des
Docteurs en Droit( Science Politique, Economie
et Gestion )