Résultats à Zahlé & Békaa-Ouest : Grand retour de Skaff, défaite du Moustaqbal
Posted by jeunempl sur mai 17, 2010
Elie Skaff a récupéré le leadership de Zahlé en obtenant 19 des 21 sièges du Conseil municipal. Une légère percée a été enregistrée par la coalition soutenue par les forces du 14 mars qui soutient que les voix sunnites sont allées à la liste rivale. Dans la Békaa-Ouest, le Moustaqbal voit son leadership sérieusement ébranlé.
Chaudes et surprenantes. C’est ainsi que l’on peut qualifier les élections municipales dans la Békaa, qui a vu l’ensemble de son paysage politique changer à la lumière des résultats des urnes. A Zahlé, bien que toutes les parties aient affirmé et réaffirmé, dans leurs discours, que ces élections constituaient une sorte d’entente fraternelle dont le seul souci est de participer au développement et à l’essor de la ville, tous les indicateurs ont démontré le contraire. C’est à Zahlé précisément qu’a eu lieu l’une des batailles politiques les plus rudes, malgré le mélange des cartes. En effet, les voix sunnites, supposées soutenir la liste du 14 mars, sont tombées dans les urnes de la liste parrainée par Elie Skaff et présidée par Joseph Maalouf. Informations confirmées par Assaad Zogheib, mais aussi par les chiffres. «La décision zahliote libre» a raflé la mise et a obtenu 19 des 21 sièges à pourvoir au Conseil municipal. Heureux de sa victoire, mais aussi de son pari gagné, Skaff s’est empressé de réitérer son leitmotiv préféré, à savoir que la «fiancée» de la Békaa a toujours été indépendante, fermée aux ingérences partisanes et entend le rester. Estce vraiment le seul facteur qui a contribué au plébiscite de sa liste? Selon l’ancien président de la municipalité et ancien allié du leader greccatholique, qui a réussi à percer la liste de Skaff, plusieurs éléments sont entrés en compte. «La principale raison de la victoire de la liste de Skaff, affirme à Magazine Zogheib, c’est que 60% des voix sunnites lui ont été accordées sans hésitation». Comment cela est-il possible, puisque les forces du 14 mars, y compris le Courant du futur, ont affiché clairement leur soutien à la liste qu’il préside? «D’après moi, répond-il, c’est le rapprochement syrosaoudien qui s’est reflété dans les urnes à Zahlé, et je trouve dommage que ce soient ces pays qui aient choisi à notre place. Il y a eu aussi le jeu des «moukhabarat» et de Jamil Sayyed, qui ont monté une liste de toutes pièces, allant jusqu’à prétendre, pour diviser les voix, qu’elle était soutenue par le 14 mars. Il y a eu, il ne faut pas l’oublier, des partisans de Nicolas Fattouche qui ont rallié la liste de Skaff et, en fin de compte, les 4 500 voix chiites versées en bloc dans les urnes». Compte-t-il conserver sa place dans un conseil où il n’aura pas de marge de manœuvre importante? «Pour la première fois dans l’histoire de Zahlé, dit-il, il n’y a pas de sunnite au conseil. Or, celui qui a obtenu le score juste après le mien appartient précisément à cette communauté. S’il s’avère qu’il peut prendre ma place si je démissionne, eh bien je partirai. J’attends la réponse des autorités juridiques pour en décider».
Jamil Sayyed dément
L’ancien directeur de la Sûreté générale, Jamil Sayyed, a formellement démenti toute ingérence dans les élections de dimanche dernier. Il n’en reste pas moins qu’aussitôt les résultats connus, il s’est empressé de publier un communiqué, dans lequel il déclare fermement que, désormais, les résultats des élections municipales ôtent toute légitimité aux députés chrétiens de la région, proches du 14 mars, exception faite de celle de Nicolas Fattouche qu’il qualifie d’indépendant. Interrogé par Magazine, le député Fattouche, ancien quatorzemarsiste, reconnaît «qu’en fin de compte, ce sont les Zahliotes qui ont eu le dernier mot, et nous ne pouvons que nous plier à leur volonté clairement affichée. Quant à moi, je n’ai donné de mot d’ordre à personne. Je respecte les choix de chacun et ne trouve aucune raison d’influencer les électeurs dans un sens ou dans l’autre. Personnellement, j’ai déposé un bulletin blanc dans l’urne. Je suis indépendant et constant dans mes prisesde position. Ce sont les autres qui ne résistent pas à l’envie de lancer une pointe à d’anciens alliés, qui sont changeants et instables», conclut Fattouche. L’un des cadres les plus actifs de la machine électorale de Skaff insiste sur le fait suivant: «Après la défaite de notre leader aux dernières élections législatives, ses partisans et même ses détracteurs se sont rendu compte que la représentativité de Zahlé avait subi un revers cuisant, notamment sur l’échiquier national. En votant pour nous lors des municipales, les électeurs ont voulu asseoir le leadership d’Elie Skaff pour que tout Zahlé en profite. N’allez pas chercher plus loin», nous dit-il, avec un sourire malicieux.
Mrad revient en force
Cette tendance à la politisation des élections municipales, propre généralement aux grandes villes, s’est étendue à la Békaa-Ouest, où les positions du Courant du futur ont été sérieusement ébranlées. Dans les 56 villages de cette région, le Courant patriotique libre (CPL) du général Michel Aoun a obtenu la majorité des sièges dans les 13 villages à dominance chrétienne, alors que le Parti socialiste progressiste (PSP) de Walid Joumblatt gagne dans les 12 villages druzes et le tandem HezbollahAmal dans les 7 villages chiites. Dans 24 localités à dominance sunnite, l’opposition a remporté la mise dans 18 villages et un consensus a été conclu entre les diverses factions politiques dans 4 autres. Le Moustaqbal n’a obtenu la majorité des sièges que dans deux localités. L’ancien ministre de la Défense, AbdelRahim Mrad, explique le revers essuyé par le Courant du futur par plusieurs facteurs. «Il y a eu certainement, indique-t-il à Magazine, un changement des mentalités qui s’est traduit dans les urnes. D’une part, il n’y a pas eu de propagande à caractère confessionnel, comme cela a été le cas lors des élections législatives. Aussi, nos détracteurs n’ont pas utilisé contre nous leur célèbre slogan du passé, nous accusant d’être à la solde de la Syrie. ‘‘Et comment cela pourrai-t-il se faire?’’, souligne-t-il avec un sourire en coin. Puisque le chef du Moustaqbal, Saad Hariri, s’est rendu à Damas et s’est rapproché de la Résistance? Pourquoi nos leaders nous ont-ils montés contre les chiites et les Syriens, se demandent les électeurs, alors qu’aujourd’hui, tout va pour le mieux entre eux? Bien que dix jours avant les élections, Ahmad Hariri, Samir Doumit et Khaled Chéhab se soient installés à l’hôtel Massabki pour faire campagne depuis les bureaux du Courant du futur, les moyens pécuniaires mis à leur disposition n’ont pas semblé suffisants, puisqu’on entend dire que l’Arabie saoudite ne les finance plus comme par le passé. Nous allons étudier cette victoire et la fructifier à l’avenir, en prenant en compte les doléances des habitants de ces régions et en essayant de répondre à toutes leurs attentes», conclu-t-il.
Laboué sort du rang
Dans la localité de Laboué, dans la Békaa-Nord, les personnalités chiites indépendantes, qui ont formé une liste tenant compte des susceptibilités familiales, ont réussi à gagner la bataille face à l’alliance Hezbollah/Amal, en tablant sur l’essor économique et le développement régional. C’est la grande tribu des Amhaz qui a décidé de tenir tête à la liste des partis chiites, raflant la mise dans la localité. Mais les vainqueurs ont refusé de donner toute dimension politique à cette bataille, réaffirmant leur attachement à la Résistance et précisant que la consultation électorale n’avait que des enjeux purement locaux. A Baalbeck, certes, le tandem chiite a obtenu tous les sièges des Conseils municipaux, mais le taux de participation a baissé. De 58% en 2004, il est tombé à moins de 40% en 2010, ce qui dénote une certaine grogne face à ce bulldozer qui monopolise toutes les décisions.
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