Un bus pour l’action humanitaire : la Croix Rouge et le Croissant rouge en campagne au Liban et dans le monde entier
Posted by jeunempl sur juillet 14, 2009
Agir pour changer le monde… Depuis le 8 mai, un bus parcourt le Liban, dans le cadre d’une grande campagne internationale pour l’action lancée par le Mouvement International de la Croix Rouge et du Croissant Rouge à l’occasion son 150ème anniversaire, sous le slogan «Notre monde, à vous d’agir». Entretien avec Christian Cardon, chargé de la communication du Comité International de la Croix Rouge (CICR).
iloubnan.info: Comment s’est passé le lancement de la campagne au Liban ?
Christian Cardon: La campagne « Notre monde, à vous d’agir » est une campagne internationale, qui dépasse le cadre de la simple sensibilisation. C’est un appel à l’action, un encouragement de l’esprit de mobilisation face à 14 défis mondiaux que nous avons identifies et que nous devons relever*. Au Liban, le lancement a coïncidé avec la période pré-électorale, ce n’était donc pas le moment le plus opportun pour toucher le plus grand nombre de personnes, l’attention étant détournée par cette échéance. Cependant, malgré cela, notre campagne se déroule de façon satisfaisante. Des panneaux ont été affichés dans Beyrouth. La Croix Rouge Libanaise est très connue, forte, et a une bonne réputation, ce qui a contribué au succès de l’opération.
Quelles sont les activités proposées par le mouvement au Liban pour cette campagne et quel est l’accueil de la population ?
Un bus est parti le 8 mai de Beyrouth pour une tournée qui se terminera le 12 Août. Les activités à l’arrivée du bus diffèrent des comités locaux et des volontaires du Mouvement. Nous avons eu par exemple une kermesse dans un parc de Beyrouth organisée par la jeunesse de la Croix Rouge Libanaise, une campagne de don du sang également à Beyrouth, des danses traditionnelles à Jezzine, un défilé avec des bougies à Saida. Le 27 juin est organisée une reconstitution de la bataille de Solférino par 250 volontaires à Batroun, pour commémorer le 150ème anniversaire de la bataille (24 juin 1849) qui a vu un jeune homme d’affaires génévois, Henri Dunant, mettre en place des mesures d’aide aux militaires blessés laissés à leur sort, sans aucune discrimination.
La campagne se base également sur un site internet (ourworld-yourmove.org) qui permet aux utilisateurs de se communiquer leurs expériences en participant à des blogs ainsi qu’en publiant des vidéos et des photos. Le but du site est de pousser à l’action, pour qu’une action en entraîne une autre à l’autre bout du monde. Une exposition de photos accompagne le bus, ainsi qu’une distribution de documents sur la Croix Rouge.
Comment est né le concept de cette campagne ?
En fait, l’idée est de mettre en place un centre de documentation mobile dans tout le pays, d’aborder la population pour leur expliquer notre action et voir ce qu’ils connaissent de nous. Le but est aussi de développer l’action sociale et humanitaire, de rechercher des témoignages de toute sorte, de toute action même si elle paraît minime, par exemple l’aide d’une personne à son voisin durant la guerre de 2006, pour encourager la mobilisation. L’exposition photo intitulée « Notre monde en guerre » regroupe des photos de cinq des photographes de guerre les plus connus, tous de l’Agence VII : James Nachtwey, Ron Haviv, Chris Morris, Franco Pagetti et Antonin Kratochvil, qui ont parcouru huit pays : l’Afghanistan, la Colombie, la Géorgie, Haïti, le Liban, le Libéria, les Philippines, à la rencontre de tous ceux qui sont touchés par un conflit armé.
Plus généralement, quelle est l’action de la Croix Rouge au Liban ?
Dans le Mouvement International de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, il faut distinguer trois composantes :
-Les sociétés nationales, qui travaillent comme des auxiliaires des autorités publiques locales dans les activités humanitaires, ainsi que comme des auxiliaires des services médicaux militaires ;
-La Fédération Internationale de la Croix Rouge et du Croissant Rouge, qui coordonne les aides internationales durant les catastrophes naturelles, les programmes humanitaires organisés par les sociétés nationales, et cherche à promouvoir leurs actions ;
-Le Comité International de la Croix Rouge (CICR), dont l’activité est liée aux conflits armés. Le CICR s’occupe par exemple de prévention, en s’adressant aux porteurs d’armes, en leur donnant des cours de droit humanitaire. Une autre de nos activités est celle de protection et de visite aux détenus en relation avec un conflit armé, par exemple les membres du Fatah al-islam détenus depuis le conflit qui les a opposés en 2007 à l’armée dans le camp palestinien de Nahr el-Bared, ou encore les individus accusés d’espionnage pour le compte d’Israël. Notre action est très différente de celle d’organisations comme Human Right Watch, qui rend publique ses observations pour tirer la sonnette d’alarme. Nous, au contraire, nous travaillons dans la confidentialité, nous pensons que cela nous permet d’avoir accès à un plus grand nombre de prisonniers ou à un plus grand nombre de sites. Par exemple ici nous avons eu accès à des personnes dont les interrogatoires étaient réalisés par l’armée. Notre confidentialité est aussi une mesure de protection pour les détenus.
Quels sont les besoins spécifiques au Liban ?
Notre première priorité aujourd’hui est de nous préparer à répondre à une situation d’urgence. En 2006, nous n’étions pas prêts à réagir à une telle situation (en référence a la guerre de juillet 2006 entre Israël et le Hezbollah ndlr). Nous avons donc tiré de la guerre de 2006 des leçons, et aujourd’hui nous gardons toujours un set-up opérationnel, c’est-à-dire des stocks de médicaments au Sud et à Beyrouth, du matériel, le nécessaire pour la protection et la reconstruction d’infrastructures telles que les réseaux d’adduction en eau potable. Ceux-ci ont été durement touchés lors de la guerre de 2006. Aujourd’hui les travaux dans le Sud touchent à leur fin, grâce a beaucoup d’efforts et de travail. Le Hezbollah a beaucoup contribué, mais nous pouvons également souligner l’effort du gouvernement sortant pour renforcer l’engagement de l’Etat dans la région.
Notre deuxième priorité est de continuer les activités de protection, notamment avec les détenus de sécurité (nous n’intervenons pas auprès des prisonniers de droit commun). Comme je l’ai dit, notre but est d’avoir un accès le plus large possible aux détenus. Par exemple lorsque le Hezbollah a capturé deux soldats israéliens, nous n’avons pas pu leur rendre visite. D’où l’importance de la communication publique, de rappeler aux gens le mandat particulier dont nous sommes investis, ce qui est également un but de cette campagne. Il est en effet important de rappeler qui nous sommes et quelle est notre action. Par exemple certains pensent encore que nous sommes une association religieuse chrétienne.
Enfin le troisième axe prioritaire de notre action est la prévention, non seulement au sein des camps palestiniens mais également à l’extérieur. Nous nous adressons à tout acteur porteur d’armes, et cherchons à être en contact avec le plus grand nombre de partis possibles. La Croix Rouge est très forte au Liban, ce qui nous permet généralement de bons contacts, un accès partout et à tous les partis. Nous travaillons avec tous ceux qui peuvent avoir une influence locale, que se soient les média, les ONG locales, les chefs religieux.
*Les quatorze défis à relever dans le cadre de la campagne « Notre monde, à vous d’agir »:
• privés de liberté : protéger la vie et la dignité des détenus
• les enfants de la guerre : donner aux enfants une nouvelle chance dans la vie
• victimes de discrimination : engagement mondial en faveur d’un changement de comportement
• changement climatique : aider les communautés à ‘adapter aux conséquences du changement climatique afin de sauver des vies
• un héritage meurtrier : éradiquer les armes qui continuent de tuer
• premiers secours : s’appuyer sur les programmes de premiers secours pour sauver des vies et réduire les tensions
• obligés de fuir : déracinés par les conflits
• eau et nourriture : travailler avec les communautés afin de renforcer la sécurité alimentaire et d’améliorer l’accès à l’eau
• faire face à la violence : résoudre les problèmes d’une région
• accès aux soins de santé : les volontaires médicaux mettent leur vie en jeu
• les femmes et ma guerre : la pauvreté est un terrain propice à la violence
• des catastrophes en augmentation : promouvoir les systèmes d’alerte rapide
• comment faire face ? : associer les personne vulnérables dans le cadre d’actions communautaires
• séparés : réunir les familles
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