Mouvement pour le Liban

Représentant le Courant Patriotique Libre en Belgique

1990 – Devoir de mémoire: La population libanaise témoigne (Chapitre 3)

Posted by jeunempl sur avril 12, 2009

(Livre Blanc du conflit Armée Libanaise – Forces Libanaises)

Ce texte entre dans le cadre plus large de la publication du Livre Blanc, regroupant les témoignages de la population lors de la guerre civile libanaise en 1990. Vous pouvez suivre l’intégralité de ce document sur cette page:
1990 – Devoir de mémoire: La population libanaise témoigne

2-livre-blanc_terreur-fl– Parce que les politiques ont voulu effacer de notre mémoire, à travers une loi d’amnistie, toutes les exactions qu’ils ont commises durant la guerre civile,

– Parce que les médias n’assurent pas leur rôle de conscientisation de la population,

Le Livre Blanc reste encore aujourd’hui une référence pour rappeler à la population, de tous ages, les malheurs que peuvent engendrer tout conflit opposant un Libanais à son propre frère libanais. En attendant que l’état assure un jour pleinement ce rôle de mémoire au niveau de ses institutions, nous vous publions en plusieurs parties le Livre Blanc, rédigé à la fin de la guerre civile par de jeunes étudiants français, extérieurs au conflit, venus au Liban dans le seul but de comprendre. Pour cela, ils partent à la rencontre de la population témoin des exactions de la milice des Forces Libanaises dans le conflit l’opposant à l’Armée Libanaise.

Chapitre 3 : Utilisation de la Terreur

Comment justifier l’injustifiable ? La guerre n’explique pas tout. On ne peut s’abriter derrière des prétextes militaires pour terroriser sa propre population. Au programme des régions contrôlées par les Forces Libanaises, vol, viol, violence, meurtre; se doublant d’arrestations arbitraires.

Sur le point des arrestations arbitraires, l’Armée n’est pas non plus exempte de reproches. Mais on ne peut comparer les attitudes des deux camps, en raison du facteur de popularité dont bénéficie l’Armée lequel lui impose une certaine discipline dans son comportement général. Vols, viols, violences, meurtres sont quasiment inconnus dans les secteurs tenus par l’Armée.

Les témoignages des riverains s’accordent à reconnaître le comportement correct des soldats.

La férocité des Forces Libanaises découle du comportement de la grande proportion de Bécharriotes (de Bécharré, village de Samir Geagea) dans les rangs de la Milice. En effet, les Forces Libanaises ont vu un grand nombre de leurs partisans Beyrouthins les quitter. Et pour grossir leurs rangs, il a fallu faire appel aux membres inscrits dans les villages de la montagne. C’est surtout dans le Nord, Bécharré et ses alentours que Samir Geagea a pu obtenir le plus grand nombre de recrues.

Les Bécharriotes célèbres pour leur force musculaire et leurs méthodes frustes sont arrivés dans la ville avec toute leur « bonne volonté » pour mater la « rébellion ». Car dans leur mental, ce serait le Général Aoun et l’Armée qui se rebelleraient contre la « légitimité représentée par le Docteur (Al Hakim) – comprenez le Dr Samir Geagea ».
«Ces hommes, nous dit un médecin, sont totalement étrangers à la zone des combats : ils n’ont là ni parents, ni amis, ni relation et n’ont donc aucun scrupule à bombarder les bâtiments civils, à procéder aux destructions massives et à se battre à l’arme blanche s’il le faut ». Pour leur permettre de s’orienter, des indications sur les routes à utiliser ont été peintes sur des murs à Adma, des civils ont été interrogés sur le chemin pour gagner le Q.G. des Forces Libanaises à la  Quarantaine.

Par ailleurs, des habitants d’Ain-el-Remaneh ont assuré avoir reconnu des étrangers parmi les combattants F.L., Egyptiens ou Syriens. Un médecin d’un hôpital d’Achrafieh nous l’a confirmé. Les Egyptiens étaient des ouvriers du bâtiment au Liban. Quant aux Syriens, ils sont chrétiens et vivent au Liban depuis plus de 15 ans sans avoir la nationalité Libanaise. Ils sont entrés dans la milice pour en quelque sorte acheter une honorabilité et commettent souvent des excès de zèle.

Vols et vandalismes

2-livre-blanc_terreur-flOn pourrait se poser la question de savoir s’il existe une lutte des classes au Liban tant est grande la hargne des miliciens à détruire et à piller comme s’ils en voulaient à l’Etat et à tous ceux qui ont des biens.

Pourquoi détruire des voitures sans raison comme à Kaslik par exemple où au début du mois de février des miliciens se sont mis à tirer dans les rues provoquant une panique générale et faisant exploser deux voitures alors qu’il n’y avait pas l’ombre d’un soldat de l’Armée.

Le phénomène a pris une telle envergure depuis le 31 janvier que le patriarche a été obligé de déplorer officiellement l’existence de vols dans le Kesrouan (sous contrôle de la milice). Mais, Sa Béatitude aurait pu en dire autant pour les autres régions que tiennent les F.L. Malgré le danger que représentent les bombardements, les civils n’osent pas quitter leur maison ou leur appartement de peur qu’ils ne soient cambriolés ou saccagés. Combien de personnes à Achrafieh ne nous ont-elles pas affirmé qu’elles seraient parties de l’« autre côté » – entendez du côté de l’Armée – si elles n’avaient craint de tout perdre. D’ailleurs dans ce secteur les miliciens ne se cachent plus, ils procèdent au pillage en plein jour et en uniforme comme s’ils n’avaient plus rien à craindre. Ainsi dans le quartier de Nasra les 22 et 23 mars c’est par camions entiers que les miliciens déménageaient les appartements inhabités. A Adma, les maisons ont été vidées et incendiées pendant les combats contre l’Armée alors que les habitants étaient terrés dans les abris.

Les magasins et les maisons de Dbayé ont été pillés à l’époque où les Forces Libanaises contrôlaient la région au début du mois de février avant l’entrée de l’Armée. Exemple: un grand magasin: l’A.B.C., le magasin de la famille Mrad (montres, bijouteries, stylos,…).

A Kaslik, des magasins ont été pillés de nuit après la fin des combats. Exemple, la bijouterie Gemayel…

A Fum-el-Cheback, tous les magasins de la rue centrale ont été pillés.

Freddy, la trentaine, ancien des F.L., a vu son logement à Ajaltoun dévasté et toute sa collection d’oeuvres d’arts emportée par les miliciens. En repartant, ils ont mitraillé les deux voitures neuves qu’il voulait revendre.
Les appartements qui se trouvaient près de sa boutique, en pleine zone de combats, ont été pillés puis incendiés.

2-livre-blanc_terreur-fl-2A Jdeideh-el-Metn, rue Joseph Abilama, Tony nous reçoit dans son appartement dévasté. Il est écœuré, il a tout perdu. Il nous raconte son malheur les larmes aux yeux. «Le 1er février, les miliciens sont entrés dans l’immeuble. On les a suppliés de ne pas tirer parce qu’il y avait des femmes et des enfants mais ils ne nous ont pas écoutés, ils sont montés sur les toits et on a entendu le bruit des Kalachnikov, l’Armée a répliqué et nous sommes descendus dans les abris. Un voisin est venu me dire que mon appartement brûlait. Je suis monté, et quand j’ai ouvert la porte, j’ai vu le feu ; j’ai voulu entrer pour l’éteindre, un milicien m’a arrêté et m’a obligé à redescendre. Le lendemain, je suis remonté chez moi. Mon appartement avait brûlé et mon coffre qui était caché sur une étagère était par terre ouvert. Ils avaient tout pris, les 9.000 dollars et nos bijoux de famille».
Tony nous montre les éclats d’une grenade et ajoute « les miliciens ont jeté cette grenade pour mettre le feu et cacher leur vol ».

Sur la route qui mène au Christ-Roi en venant de Jounieh, les F.L. ont occupé le Centre d’Etudes et de Recherches sur l’Orient Chrétien, l’ont ensuite quitté en prenant dossiers, microfiches, etc. et ce, trois semaines après le début des combats. Les institutions n’ont pas été épargnées : les Forces Libanaises sont accusées du vol de 75 millions de L.L. à la Banque Centrale de Jounieh en mars – des sources qui demandent l’anonymat nous précisent qu’il s’agirait du colonel Paul Farès qui collabore avec les Forces Libanaises – et de 350 millions de L.L. au Ministère des Finances à Furn-el-Cheback. Au même endroit, les Forces Libanaises ont détruit le Ministère des Télécommunications en sciant les câbles de la centrale pour rendre les communications impossibles. Toutes les archives du Ministère des Affaires Etrangères auraient été volées et la résidence centrale des Forces de Sécurité Intérieure – i.e. la gendarmerie – pillée. Ces faits figurent dans la lettre adressée au Pape par une instance religieuse.

Intimidations et violences

Les populations civiles sont systématiquement victimes des méthodes de terreur utilisées par la milice, soit en réaction à l’impopularité dont elles sont l’objet, soit comme moyen de gouvernement pour tenter de se protéger. « Qu’importe qu’ils m’aiment, pourvu qu’ils me craignent ».

L’intimidation passe par les procédés les plus grossiers.
2-livre-blanc_terreur-fl-3Tout signe ou toute manifestation de soutien au Général Aoun est sévèrement réprimée. Les gens peuvent être battus pour un mot de trop. Cette politique d’intimidation avait commencé bien avant les combats.

Depuis la fin décembre 1989 déjà à Ajaltoun des miliciens qui avaient acquis la certitude qu’un commerçant de l’endroit entretenait des sympathies Pour Michel Aoun, l’attendirent le soir à la fermeture du magasin et le frappèrent sauvagement. Le commerçant qui fut hospitalisé plusieurs jours n’osa pas porter plainte auprès du supérieur de ces miliciens, car ceux-ci auraient pu revenir se venger. Lorsque les combats commencèrent entre l’Armée et les F.L., son commerce fut pillé puis quelques jours plus tard les miliciens le firent sauter à la dynamite. Un char passa sur sa voiture. Les miliciens firent une descente chez lui, le commerçant parvint à se cacher, se laissa pousser la barbe et finalement passa dans le secteur contrôlé par l’Armée.

Même dans le secret de leur appartement, les gens n’osent pas écouter Radio Liban, la radio proche du Général Aoun. Ils n’osent même plus avoir un drapeau Libanais chez eux, celui-ci étant identifié au camp du Général.

A Maameltein, les miliciens ont pillé les maisons de ceux qui avaient un autocollant représentant le drapeau Libanais sur leur voiture.

A Achrafieh du côté de Sioufi, dans la première quinzaine de mars, un milicien s’approche d’un enfant, joue un peu avec lui et lui demande :
– Ton papa a-t-il une voiture ?
L’enfant répond par l’affirmative et la lui montre.
– C’est dans cette voiture que vous êtes allés à Baabda pour voir le Général ?
L’enfant répond une fois de plus par l’affirmative. Durant la nuit un bâton de dynamite fera sauter la voiture.

Cela peut aller jusqu’au meurtre. Fadi Chihan, un jeune de vingt ans, dont la voiture portait un autocollant représentant le
Général Aoun, a été abattu d’une balle dans la tête par des miliciens à Haret-Sakhr. Aucun des témoins de la scène n’a osé lui porter secours et ce n’est qu’une demi heure après qu’un homme est allé ramasser son corps.
Les familles des personnes assassinées ne les déclarent pas et demandent au médecin légiste de faire un certificat sans mentionner la cause du décès par peur des représailles, nous certifie un autre prêtre.

2-livre-blanc_terreur-fl-4Au chapitre des violences, signalons le cas de ces Srilankais, Thaïlandais, ou autres Indiens qui sont employés à des tâches militaires contre leur volonté. Ils travaillent la journée – dans des chantiers, ou comme balayeurs – et la nuit, les miliciens viennent les chercher du ghetto où ils sont entassés pour les conduire de force, les yeux bandés vers une caserne ou un point de fortification dans la montagne pour creuser des tranchées, ranger les sacs de sable, transporter les obus ou nettoyer les canons. Ils sont menacés et battus s’ils tentent de refuser. Ils travaillent non seulement gratuitement pendant des heures prises sur leur sommeil, mais ils sont de surcroît maltraités par les miliciens.

Ces cas ne sont pas uniques, comme en témoigne cette religieuse qui ne mâche pas ses mots : « Les Forces Libanaises font travailler les pauvres gens qui sont là et surtout les jeunes, qui restent pour transporter leurs munitions et les forcent à les aider dans leur sale besogne qui est de tuer le plus de gens possible ».

Les cas de viols, notamment dans la région des combats à Ainel-Remaneh, sont attestés par de multiples sources, bien que les témoignages directs, – et cela est compréhensible – manquent.
Ainsi nous rapporte un religieux, à Ain-el-Remaneh, début février, un père de famille lui a raconté en pleurant: « J’avais trois jeunes filles et ma femme chez moi. Les miliciens sont entrés une nuit. J’ai maintenant 4 femmes à la maison ». Elles avaient été violées.

Nombreuses sont les femmes qui ont quitté les secteurs tenus par les Forces Libanaises de peur d’être violées. Quand cela arrive, la famille garde un silence honteux de crainte que les voisins ne découvrent leur malheur. Dans ce pays de l’Orient, personne ne parle du viol. Une religieuse qui avait des informations nous a dit : « Est-ce bien nécessaire d’en Parler ? D’ailleurs plusieurs Libanaises qui devaient témoigner devant nous se sont finalement désistées. Par contre, des étrangères qui travaillent dans les régions des F.L. comme femmes de ménage – et non pas dans des maisons closes comme beaucoup, qui sont contraintes de le faire – et qui vivent dans de véritables ghettos, ont osé, elles, nous le dire. Des Indiennes, des Skrilankaises, des Thailandaises se sont plaintes de recevoir la visite de miliciens pendant la nuit : « Ils nous obligent à faire l’amour avec eux, après avoir emmené nos maris dans leur caserne » nous ont-elles affirmé.

Les arrestations arbitraires

Les arrestations arbitraires ne sont pas le fait des seules Forces Libanaises; l’Armée aussi utilise cette méthode. A une moins grande échelle néanmoins – cela se comprend ne serait-ce que parce que les partisans de Samir Geagea sont beaucoup moins nombreux – et généralement sans utiliser la torture à l’encontre des détenus. Elle se contente de les arrêter et de les enfermer.
L’optique aussi est différente : pour les Forces Libanaises il s’agit non seulement d’empêcher qu’une résistance s’organise mais de surcroît de casser cet élan qui porte le peuple vers le Général Aoun; en d’autres termes leur aigreur, leur frustration, leur sentiment d’avoir été non pas mal compris mais dénigrés les poussent à se venger et à punir ceux qu’ils jugent comme ingrats. L’Armée a d’autres mobiles : « Nous avons peur des espions et des saboteurs, ceux-là peuvent très bien n’avoir jamais porté l’uniforme des F.L. » se défend-elle ; mais ses méthodes en la matière n’ont rien à envier à celles des F.L. descentes chez le suspect, arrestations sur les barrages, dénonciations.

Il suffit qu’il y ait des présomptions, des rumeurs, le moindre doute sur une personne pour que celle-ci se voie inquiétée, voire arrêtée.
Dès le début de la guerre, les Forces Libanaises sont allées questionner ceux qui avaient combattu dans leurs rangs avant de les quitter. Ceux qui étaient suspectés d’être favorables au Général ont été également inquiétés.

A Ghazir, quatre jeunes qui ont été séquestrés ne sont plus rentrés chez eux. Selon certaines rumeurs, ils auraient eu les membres cassés.

A Achrafieh, un jeune homme fait la queue devant une boulangerie. Des miliciens l’interpellent:
– Qu’est-ce que tu fais comme travail ?
– Je suis étudiant, leur répond-t-il.
Les miliciens l’arrêtent et lui font subir un interrogatoire musclé pendant six heures avant de le relâcher.
– Tous les étudiants sont allés voir Aoun et c’est pour cela qu’on t’a frappé, fut leur seule explication.

Et gare à ceux qui ont des parents dans l’Armée; ils peuvent payer pour eux quelque soit leur âge.
Selon des sources de diverses origines, les noms des jeunes qui avaient participé aux manifestations de Baabda ont été répertoriés sur des listes et les miliciens sont allés chercher ces jeunes à leurs domiciles. Nous ne savons pas si l’organisation des Forces Libanaises leur permet un tel tour de force car environ 70 à 80% de la population est montée à Baabda, mais nombreux sont les jeunes qui ont été emprisonnés au moins quatre ou cinq jours au début des combats : les miliciens savaient où trouver ceux qui s’étaient fait remarquer à Baabda ou qui avaient trop ouvertement montré leur choix. Une jeune fille de vingt ans, qui habite Jounieh, témoigne : « La seule chose que j’aie pu faire quand je suis rentrée chez moi, c’est me précipiter vers l’endroit où se trouvaient les albums de la famille, pour en retirer les photos de quelques amis qui sont dans l’Armée Libanaise, parce que les Forces Libanaises fouillaient partout pour accuser les gens ».

Beaucoup de jeunes n’ont pas attendu qu’on vienne les chercher chez eux pour partir. Nous en avons rencontré un grand nombre qui avaient fui leur maison dès les premiers jours et qui, réfugiés dans la zone contrôlée par l’Armée, nous demandaient quand ils pourraient retourner chez eux. Car, et c’est une tragédie, le Liban connaît une nouvelle frontière intérieure, plus hermétique encore que les autres, pour au moins plusieurs milliers de personnes.
L’Armée, quant à elle, utilise aux barrages d’anciens miliciens pour repérer d’éventuels membres des F.L. Les arrestations pour contrôle ne sont pas rares.

2-livre-blanc_terreur-fl-5Le tunnel de Nahr-el-Kalb qui relie Beyrouth à Jounieh et sépare donc les belligérants est bouché par les F.L.
Un médecin de l’hôpital Notre-Dame, pro-F.L, nous confiait qu’il ne retournait pas dans sa maison à Fanar (dans la région de l’Armée) de crainte d’être arrêté. Nous avons effectivement rencontré dans les prisons de l’Armée, des Libanais qui n’étaient pas a priori des combattants mais qui se trouvaient là soit parce qu’ils avaient appartenu aux F.L., soit parce qu’on les soupçonnait de sympathie pour elles. De deux choses l’une: soit que des charges existent contre eux, et dans ce cas, une enquête et des interrogatoires fréquents doivent être menés de manière à lever aussi vite que possible le doute, soit au contraire que rien de sérieux n’existe et il faut dès lors les relâcher, surtout lorsqu’il s’agit de mineurs ou de personnes âgées.

2-livre-blanc_terreur-fl-6Walid Nehmé (dix-sept ans) à titre d’exemple, était à la date du 26 mars, emprisonné depuis un mois parce qu’il allait voir des amis dans des casernes des Forces Libanaises. Etait-il enfermé parce qu’il avait des amis F.L. ou parce que des charges sérieuses pesaient contre lui ? Dans ce dernier cas, Pourquoi n’a-t-il été interrogé qu’une fois seulement, le jour de son arrivée.

Sami Dalli a été arrêté à Jdeideh chez lui; il a soixante cinq ans et le 26 mars, était enfermé depuis seize jours, n’ayant été interrogé que le premier jour. Là aussi on se pose les mêmes questions.

On est aussi arrêté parce que l’on a des frères dans les F.L. Eid et Dib Khadra, trente-six et trente-quatre ans, arrêtés depuis cinquante deux jours, parce qu’ils ont quatre frères dans les F.L., n’ont été interrogés que deux fois, la dernière fois remontant à quarante jours, à la date du 26 mars. On est arrêté parce qu’on a appartenu aux Forces Libanaises : Saïd Nalm, vingt-trois ans, trente deux jours sous les verrous et interrogé une fois : il avait pourtant démissionné des F.L. un an plus tôt. L’Armée nous explique que les F.L. n’acceptent plus les démissions depuis deux ans.

Elie Jureidini, vingt ans, est en prison depuis quatre jours à la date du 26 mars parce que des rumeurs prétendaient qu’il appartenait aux F.L.

Par ailleurs, ces détenus ont été traités comme les autres prisonniers.

La terreur

Terroriser les populations, c’est aussi utiliser les francs-tireurs pendant les trêves, pour contraindre la population à rester dans les abris. Comment se nourrir et s’approvisionner en eau dans ces conditions ? Antoine est resté dix jours dans son immeuble se nourrissant d’aliments pour bébés, et il lui fallait plusieurs heures pour parcourir quelques mètres, d’un abri à l’autre. Terroriser, c’est aussi poser des mines sans prévenir, sur les ponts, les routes, dans les jardins.

De telles méthodes relèvent de la guerre totale, celle pratiquée par des occupants sur une population qui leur est étrangère.

Les francs-tireurs

Nous n’examinerons ce problème que sous l’angle du meurtre et pas du fait de guerre. Tirer sur l’ennemi dans un immeuble en face est une chose; tirer sur la population en est une autre.
L’Armée a aussi ses tireurs. Mais selon tous les témoignages, les abus viennent de certains éléments incontrôlés des Forces
Libanaises qui tuent pour le plaisir ou sous l’effet de la drogue.

Les miliciens se sont souvent installés dans des immeubles habités, contraignant les habitants à se réfugier dans les abris puis à fuir. A Adma par exemple, des francs-tireurs s’installaient dans les appartements les plus élevés des immeubles et tiraient sur les civils à l’extérieur, sous prétexte qu’il pouvait s’agir de soldats habillés en civil.

Beaucoup de corps de civils tués sont restés exposés plusieurs jours, parce que les francs-tireurs mitraillaient tous ceux qui s’en approchaient.

A Achrafieh, le corps du docteur Tayah, gynécologue à l’Hôtel-Dieu est resté trois semaines dans la voiture où il avait été écrasé par un obus.

A Ain-el-Remaneh, une femme a agonisé pendant sept heures au milieu de la chaussée, victime d’une hémorragie à l’abdomen, sans qu’on puisse lui porter secours.

Les miliciens tirent même lorsque l’on agite un drapeau blanc pour secourir des blessés ou distribuer des médicaments. A titre d’exemple, après bien des tractations, le responsable d’un organisme humanitaire a été autorisé à sortir, mais une fois par jour, et lui seulement, avec un colis de médicaments qu’il devait porter sur la tête.

Les mines

2-livre-blanc_terreur-fl-7Les Forces Libanaises ont posé des mines sans en avertir la population : mines anti-chars sur les ponts et les routes et mines anti-personnels près des habitations.

Début février, une voiture qui ramenait six enfants bloqués au Collège du Mont la Salle à Ain Saadé, sur la route de Beit-Méry, a sauté sur une mine sur le pont de Sin-El-Fil (Jisr-el-Wati).
Quatre enfants ont été hospitalisés à l’Hôpital Saint-Joseph à Dora. Les deux autres élèves sont morts et leurs cadavres sont restés dix-neuf jours sur la chaussée, sans avoir pu être enlevés, à cause des francs-tireurs.

2-livre-blanc_terreur-fl-81A Achrafieh, vingt personnes au moins ont sauté sur des mines, nous certifie un médecin de cette localité.
En se retirant de certains quartiers, les Forces Libanaises ont posé des mines occasionnant des pertes civiles plusieurs jours plus tard.

A Ain-el-Remaneh, deux enfants ont été grièvement blessés en jouant parmi des détritus minés.
Les mines anti-personnels étaient dissimulées partout, ce qui rendait les opérations de nettoyage et de déblaiement particulièrement dangereuses.

Ces mines occasionnent des blessures allant de l’amputation de la jambe à la castration.

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