Elections au Mont-Liban: Alliances et rapports de forces
Posted by jeunempl sur mars 30, 2009
Si, dans les circonscriptions de Aley et du Chouf, la composition politique des communautés druze et sunnite fait nettement pencher la balance en faveur des forces du 14 mars, les autres régions du MontLiban, à très forte majorité chrétienne, restent plus ou moins ancrées dans l’orbite du CPL qui sera jugé sur ses choix politiques depuis 2005. A deux mois du scrutin fatidique, Magazine dresse un état des lieux.
Lors du lancement de la machine électorale du Courant patriotique libre (CPL), Michel Aoun a identifié les champs de bataille électorale les plus incertains: Beyrouth I, Zahlé et le Koura. Il n’a cité aucune circonscription du MontLiban, considérant que les résultats donneront l’ensemble de ses candidats vainqueurs, quelles que soient les circonstances ou, plutôt, parce qu’il a déjà une idée assez précise des forces qui s’érigeront contre lui, ses candidats et l’opposition. Car les données politiques de ce scrutin sont radicalement différentes du schéma de 2005. Le CPL est devenu un indéfectible allié du Hezbollah, la loi électorale n’est plus la même et, surtout, le général Aoun a exercé son magistère pendant quatre ans. Le tsunami a fait son œuvre, reste à savoir si les électeurs lui en tiendront rigueur. Pour remporter la mise le 7 juin prochain, le parti aouniste devra résoudre une équation à quatre nouvelles inconnues: le rôle du président Michel Sleiman à Jbeil, l’influence de Bkerké au Kesrouan, l’unification des rangs loyalistes dans le Metn et la prégnance des candidats indépendants à Baabda. Dans chacune de ces régions, le combat repose sur des données géographiques, démographiques et politiques propres à elles. Entre les rumeurs de marchandages, le bouillonnement des sondages et les intentions des uns et des autres, la cartographie politique est désormais assez claire pour identifier les forces en présence.
METN
LES ARMÉNIENS FERONT PENCHER LA BALANCE
Le Metn est traditionnellement considéré comme le bastion du maronitisme politique. Cette région est l’objet d’énormes tractations et, comme en 2007, lors de l’élection partielle, le résultat promet d’être extrêmement serré.
Pour l’opposition, après la déclaration, publique ou officieuse, de près d’une vingtaine de candidatures, le CPL pourrait, au final, garder les mêmes candidats qu’en 2005. Pour trois des quatre sièges maronites, le secrétaire du bloc parlementaire du CPL, Ibrahim Kanaan, et les députés Nabil Nicolas et Camille Khoury semblent s’être rendus incontournables et ont convaincu le général par leur verve et leur sérieux. Le CPL peut compter sur de nombreux alliés, notamment le PSNS du maronite Ghassan Achkar, qui pourrait ravir le siège de Salim Salhab. Le CPL devrait également renouveler sa confiance à Edgard Maalouf qui a fait l’objet de nombreuses sollicitations venant de son ancien colistier, celui qui a rebattu à lui seul les cartes dans la région, Michel Murr. Même si les sondages montrent que la rupture entre MM. Murr et Aoun n’a que très peu écorné la réserve de voix qui se sont ajoutées à celles des aounistes en 2005 et 2007, l’ancien ministre de l’Intérieur poursuit sa route et tente de rallier à sa cause les Kataëb, qui seront représentés par Sami Gemayel. Mais certaines alliances ne plaisent pas forcément aux alliés politiques des Kataëb au sein du 14 mars. En gros, le député Michel Murr, allié d’une certaine manière avec le Tachnag arménien, a établi un accord électoral avec les phalangistes. Or, depuis 2007, ces derniers sont en froid avec le Tachnag, mais allié au ministre Nassib Lahoud. Les demandes de ce dernier contredisent les accords entre les Kataëb et le Tachnag, puisqu’il a joint sa voix aux Arméniens du 14 mars pour réclamer une place à ce courant représenté par Jean Ogassabian. Il devient clair que le Tachnag, par la voix de son député Hagop Pakradounian, appellera à voter pour la liste de l’opposition et la personne de Michel Murr, qui se trouve désormais en porteàfaux avec les forces du 14 mars, qui voudraient former une liste complète. La candidature d’Eddy Abillamaa, membre des Forces libanaises, pourrait poser le même genre de problèmes. Face à ces négociations, Abdallah Bou Habib, viceprésident de la Ligue maronite, et Fadi Abboud, président de l’Association des industriels, continuent de réfléchir à une troisième liste commune, à moins que l’aventure Murr s’achève prématurément et qu’il compose seul sa liste.
KESROUAN
LES ALÉAS DU 14 MARS
Cette année, la bataille électorale du Kesrouan voit s’affronter deux paradoxes. Malgré les débats virulents entre le patriarcat maronite et Michel Aoun, le CPL reste, selon tous les sondages, le parti majoritaire dans une circonscription presque exclusivement maronite. Et, justement, malgré la symbolique politique de la région, le résultat se jouera essentiellement sur des considérations familiales, voire clientélistes. Pour le moment, trois démarches distinctes se sont mises en mouvement; deux sont politiques, l’autre est plus consensuelle. Michel Aoun devrait y reconduire la même liste qu’il présidait en 2005 et qui comportait Nehmetallah Abi Nasr, Farid Elias elKhazen, Youssef Khalil et Gilberte Zouein, avec la possibilité de remplacer l’un de ses colistiers par Joseph Zayek. La démarche du 14 mars est totalement différente. Les loyalistes, dans cette région, partent de très loin. En 2005, la liste Aoun avait conquis 63% des électeurs, soit le double de celle du 14 mars. La circonscription est formée des deux régions du Ftouh et du Kesrouan. Le Ftouh englobe, notamment, les secteurs de Dlebta, Ghazir, Qattine, Kfour, jusqu’au littoral de Oqaibé et jusqu’à Yahchouch. Le Kesrouan commence à Jounié, Ghosta, Zouk Mikaël, jusqu’à Faraya, en passant par les hauteurs de Ajaltoun, Reyfoun et Feytroun. La zone du Ftouh est traditionnellement représentée par deux députés et le Kesrouan par trois. Pour le Ftouh, le 14 mars a enregistré trois candidatures. Celle de Mansour elBone qui semble incontournable, le débat se situe entre Sejaan Azzi, dont la candidature est soutenue par Amine Gemayel, le leader des Kataëb, et Camille Ziadé, viceprésident du Renouveau démocratique de Nassib Lahoud. Comme substitut, le parti phalangiste pourrait soutenir Maroun Abou Charaf, fils de l’ancien député Louis Abou Charaf. D’autres candidats comme Nawfal Daou, proche des Forces libanaises, pourraient se présenter. Les candidats du Kesrouan sont peutêtre moins nombreux. Farid Haïkal elKhazen devrait se lancer dans la course, mais attend encore, de même que les anciens ministres Farès Boueiz et Youssef Salamé, très gros pourvoyeurs de voix, les résultats de la troisième démarche lancée par un Nehmat Frem très courtisé. Grand industriel et homme d’affaires bien connu du public et proche du président Michel Sleiman, le fils de Georges Frem déploie, en effet, d’intenses efforts afin de parvenir à une liste consensuelle et d’éviter, ainsi, une confrontation trop fiévreuse. Sollicité par divers milieux pour se porter candidat, il a annoncé qu’il ne se lancerait dans l’arène que s’il parvient à faire pencher la balance en faveur du consensus.
JBEIL
EN ATTENDANT LE PRÉSIDENT
La circonscription de Jbeil offre trois députés au Parlement, deux sont maronites et le troisième est chiite. Pour des raisons qui tiennent au paysage particulier de la région, les listes comportent un candidat du littoral et deux représentants de la Montagne. En 2005, la liste du CPL a remporté la victoire avec plus de 55% des voix. Parmi les vainqueurs, pour le scrutin de juin, Michel Aoun devrait renouveler sa confiance à l’actuel député chiite Abbas Hachem. Désormais membre du parti aouniste, le dignitaire de Tourzaya s’est imposé comme le seul candidat chiite possible sur la liste du CPL. Pour le candidat maronite de la Montagne, le CPL se dirige vers la nonreconduction de l’actuel député Chamel Mozaya. Pour le remplacer, le parti compte, au moins, trois candidats qui mènent une féroce campagne interne. Le favori de cette course est Simon Abi Ramia, membre du conseil exécutif du CPL et originaire d’Ehmej déjà aux côtés du général Aoun à Paris. Parmi ses concurrents, se trouvent notamment deux autres responsables au sein du Tayyar, Bassam Hachem, originaire de Akoura, et Michel Karam, coordinateur du parti pour la région de Jbeil. Le vainqueur de cette compétition pourra compter sur le soutien de ses concurrents d’un jour. Autre candidat sérieux, Fadi Rouhana Sakr, originaire de Qartaba, qui y est très bien implanté. Il se définit luimême comme un indépendant prêt à offrir ses services au général. S’il ne devait pas intégrer la liste du CPL, il pourrait puiser dans la réserve de voix du parti. Dans une moindre mesure, et dans un positionnement franchement neutre mais à l’affût d’offres électorales, l’ancien député Emile Nawfal pourrait présenter sa candidature, ainsi que le chiite Talal Mekdad, représentant de la plus grande famille chiite de la région, et, peutêtre, Samir Haïdar. Un autre candidat important est originaire de Qartaba, il s’agit de Farès Souhaid, coordinateur du secrétariat général du 14 mars. Les loyalistes devraient également reconduire la candidature du chiite Mahmoud Awad, qui s’était présenté en 2005. Reste à désigner, pour les deux camps, leur candidat du littoral, où flotte l’ombre du président Sleiman.Le président ne soutiendra publiquement ni de liste, ni de candidat, pour ne pas prendre le risque d’écorner la dimension consensuelle de sa présidence. Mais tous les candidats du littoral, à l’exception notable de Carlos Eddé, leader du Bloc national, dans une démarche individuelle, et de Tanios Cordahi, responsable du parti Kataëb dans la région, qui peuvent intégrer la liste du 14 mars, sont d’une manière ou d’une autre liés au président. La famille Khoury est la plus importante dans le village natal du président, Amchit. Cette année, elle pourrait compter deux candidats dans deux camps opposés. Le député sortant, Walid Khoury, est à nouveau candidat. Bien que sa campagne reste discrète, il fait encore partie des choix de Michel Aoun. Mais un autre très proche du CPL a présenté sa candidature, Jean Hawat, dont les supporters expliquent qu’il a obtenu la bénédiction du président dont la fille a épousé le neveu de Jean Hawat. Au final, la grande inconnue de ce scrutin reste Nazem Khoury. Le conseiller politique du président a récemment démissionné de son poste pour prendre part à ces élections. Depuis, il s’est entretenu avec certains candidats. L’équation est claire. Si le président devait s’impliquer, il essaierait d’épargner à Amchit une confrontation entre Nazem et Walid Khoury, sommant, de manière directe ou indirecte, l’un des deux de se retirer. Sinon, trois voire quatre listes pourraient s’affronter dans la région.
BAABDA
L’ALLIANCE AOUN-HEZBOLLAH EN PREMIÈRE LIGNE
Sur le papier, la circonscription de Baabda semble pencher en faveur de l’opposition, car l’alliance entre le CPL et le Hezbollah jouera plein pot. Mais les candidatures des trois sièges maronites, des deux sièges chiites et du siège druze sont sujettes à des négociations au sein même des deux camps qui compliquent la formation des deux listes. Pour la majorité actuelle, quatre sièges sont déjà pourvus. Les maronites Salah Honein et Edmond Gharios représenteront le littoral, le druze Ayman Choucair représentera le PSP de Walid Joumblatt et le chiite Bassem Sabeh, proche de Saad Hariri. Le deuxième siège chiite se jouera entre Saad Slim et Salah Haraké. Le dernier siège maronite dépendra, en réalité, de la place que voudra y prendre l’inamovible Pierre Daccache. Le député préférerait ne pas intégrer cette liste pour ne pas se placer comme concurrent de la liste de l’opposition. Si le Courant du 14 mars n’arrivait pas à décider M. Daccache de les rejoindre, Walid Joumblatt et Amine Gemayel pourraient pousser leurs candidats – Abdallah Farhat pour le premier et Gaby Semaan pour le second. Pour l’opposition, à peu près le même tableau. Les maronites Hekmat Dib et Naji Gharios, pour le CPL, sont prêts. Après que Talal Arslan eut annoncé vouloir se présenter dans la circonscription de Aley, le candidat de l’opposition pour le siège druze devrait revenir à un membre de la grande famille Aawar. L’un des strapontins chiites reviendra à Ali Ammar. Le deuxième est conditionné par un accord entre Michel Aoun et Nabih Berry. Les deux leaders poussent la candidature de leurs protégés, Ramzi Kanj pour le CPL et Talal Hatoum pour Amal. Le troisième siège maronite se jouera entre trois personnes aux profils différents, les cadres du CPL, Alain Aoun et Fadi Gergès, et l’ancien bâtonnier Chakib Kortbawi.
ALEY
ENTRE LE BEY ET L’ÉMIR
A Aley, la réconciliation druze permettra à l’émir Talal Arslan de s’assurer un siège de député. Mais à part ce changement, la liste de Walid Joumblatt devrait rester la même. Fouad Saad, Henri Hélou, Antoine Andraos et Akram Chehayeb devraient être reconduits. De son côté, l’opposition devrait pouvoir compter sur Marwan Abou Fadel. En plus de Talal Arslan, le choix du deuxième druze sur la liste se fera entre le compagnon de Talal Arslan, Issam Charafeddine, ou le membre du PSNS, Mahmoud AbdelKhalak. Pour les deux sièges maronites, de nombreux candidats se sont déclarés. Rien n’est encore certain à ce niveaulà.
CHOUF
LA CHASSE GARDÉE DE WALID JOUMBLATT
Dans le Chouf, Walid Joumblatt a fort à faire avec ses alliés du 14 mars qui réclament tous un siège. Au final, après de longues discussions entre Ghattas Khoury et Dory Chamoun, le choix s’est finalement porté sur le leader du PNL, qui remplacera Nabil Bousta ny. Les sortants druzes, Walid Joumblatt et Marwan Hamadé, sunnites, Mohammad Hajjar et Alaeddine Terro, les maronites Elie Aoun et Georges Adwan, et le catholique Nehmé Tohmé sont candidats.Pour l’opposition, les trois maronites seront Naji Boustany, le ministre Mario Aoun et Nassif Azzi. Les candidats druzes seront Wiam Wahhab, Khalil Hamadé ou Maan AbdelKhalak. Pour les sunnites, Zaher Khatib et un candidat de la famille Oueidat.
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