Des mezze comme au Liban
Posted by jeunempl sur juillet 29, 2008
(La Presse – Robert Beauchemin)
Le contact étroit avec la culture libanaise et, surtout, sa cuisine, a fait de nous des adeptes. Au Québec, pas un placard qui n’ait son pot de tahini, pas un buffet qui ne compte sa jarre de hoummos ou de baba ghanouj.
Spontanée, simple et fraîche, la cuisine libanaise n’est jamais aussi connue que par ses mezze, une série de petits plats qui seraient l’équivalent de l’entrée et de l’amuse-bouche si on les servait au même moment. Le mezze se compose de tout ce qu’on a sous la main, légumes frais ou secs, herbes, noix, viandes et volaille, et se décline surtout en miniatures qu’on dépose sur la table. Plus il y a de convives, plus il y a de plats différents.
Les Libanais aiment à croire qu’ils ont perfectionné cet art des miniatures, en ajoutant de nouveaux plats et en réinventant les anciens, à chaque génération. Et comme le Liban est un pays carrefour de plusieurs cultures qui se sont entrecroisées au cours des siècles, chaque communauté a elle aussi développé ses propres recettes. Ainsi, Arméniens, Grecs et maronites chrétiens, Juifs et musulmans ont tous emprunté les recettes des uns et des autres et les ont adaptées.
L’origine du mot mezze n’est d’ailleurs pas très claire. Il viendrait du perse «meze» qui veut dire «goût» ou de l’arabe «mazmiz» qui lui, signifie «grignoter». Par conséquent, tout ce qui est petit et goûteux se qualifie pour faire partie d’un mezze. Il s’agirait à l’origine d’une cuisine de café dans le sens, où on y mangeait surtout ces petits plats (accompagnés de boissons alcoolisées selon l’historien Sami Zubaida). Ce sont les hommes qui en ont popularisé la consommation, puisque de tradition, on interdisait aux femmes l’accès aux cafés et surtout, à l’alcool.
Ce qui est encore moins clair, c’est s’il s’agit d’une tradition purement libanaise ou d’une habitude héritée de l’Empire ottoman (la Turquie donc) qui régna sur ce bout de territoire pendant 400 ans. En outre, toutes les anciennes colonies de l’ancien Empire proposent des variations sur le thème de la miniature: la Grèce, l’Irak, la Turquie et aujourd’hui Israël et la Palestine. Non figée dans le temps, la tradition des mezze incarne plutôt l’adaptation et le changement.
La référence montréalaise
Raymonde Bachour en sait quelque chose. Avec son mari, elle a fondé la maison de traiteur Palmyra qui, au fil des ans est devenue une sorte de référence. On y sert des plats libanais classiques à emporter et toute une génération de Montréalais a découvert cette cuisine grâce aux petits soins de Mme Bachour.
En 30 ans de vie à Montréal, celle-ci a été témoin des changements d’habitudes de la plupart des Québécois vis-à-vis de la cuisine de son pays. Aujourd’hui, on peut aisément se procurer du pain pita et de la tartinade de pois chiches ou d’aubergines fumées un peu partout dans la province.
En les adaptant aux produits locaux, Mme Bachour a donné à ses mezze un caractère particulier. Ce faisant, elle a multiplié son répertoire. Pourtant, elle insiste, il n’y a rien de plus facile – et de plus sain – que de préparer quelques plats de légumes en purée ou en trempette, en salade ou en braisés et de leur ajouter quelques brins d’herbes ou une pincée de Cayenne pour les transfigurer.
Cela commence toujours de la même manière: un panier de pita frais, un plat d’olives, une assiette d’herbes fraîches, menthe et coriandre surtout, et un peu de fromage. Ensuite, on complète avec des purées, et peut-être quelques éléments de friture. On peut produire en peu de temps un repas gargantuesque qui peut rester entièrement végétarien. Ce qui en fait l’une des cuisines les plus saines que l’on puisse trouver en ville. Et cela en tout temps.
En tout cas, Mme Bachour nous prévient, il faut juste faire attention de ne pas abuser de toute cette nourriture tant elle est savoureuse, si l’on veut aussi profiter du reste du repas.
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