Fondation de la Rencontre chrétienne nationale : un document appelle au respect de la Constitution et au soutien du chef de l’État
Posted by jeunempl sur juillet 7, 2008
(L’Orient le Jour)
Occultant entièrement la question relative à la formation du gouvernement, le chef du Bloc parlementaire de la réforme et du changement, Michel Aoun, s’est employé hier à défendre jusqu’au bout la Résistance, affirmant même qu’il fallait la renforcer. Au cours de la réunion consacrée à la Rencontre chrétienne nationale, il a attaqué avec fermeté la politique israélienne « qui repose sur la force des armes », dénonçant par la même occasion la politique américaine au Moyen-Orient. Sans oublier des rappels insistants sur l’importance de l’exhortation apostolique, le Concile du Vatican II et la place « pionnière » sur le plan religieux, notamment des chrétiens du Liban.
Plus de 200 personnes ont été à la Rencontre chrétienne nationale qui s’est tenue hier à l’hôtel Le Royal à Dbayé, pour écouter, comme l’a bien précisé le présentateur, Habib Younès, « un épître selon Michel Aoun ».
Souhaitant que cette rencontre soit le coup d’envoi d’un processus qui permettrait de tracer « les lignes politiques qui renforcent l’immunité du Liban et lui permettent de jouer son rôle pionnier dans son environnement arabe et dans le monde », le général Aoun a affirmé que celui-ci « n’est pas ponctuel », mais qu’il s’agit d’une « pensée homogène » et d’une « conduite pratique » à travers lesquelles « nous devons trouver un mécanisme pour traiter de façon convenable avec les changements régionaux et internationaux ».
M. Aoun a dans ce cadre rappelé qu’avec la chute de l’Union soviétique, « l’hégémonie des États-Unis sur le monde est devenue évidente ». Quant aux États faibles, ils sont devenus des pions sur l’échiquier des grandes forces qui « les déplacent selon leurs intérêts et leurs objectifs », mettant ainsi leur avenir en danger.
Le Liban n’a pas échappé à cette nouvelle réalité mondiale, a noté M. Aoun, soulignant qu’il est devenu « une des cartes » qui permettent de parvenir à une solution globale dans la région du Moyen-Orient. « Et que de fois, il a été présenté comme prix de consolation dans le cadre des négociations visant à préserver les intérêts israéliens, a-t-il ajouté. Il continue à être proposé comme solution au problème le plus épineux, c’est-à-dire l’implantation des Palestiniens, après qu’Israël eut refusé leur droit au retour. »
C’est dans ce contexte et face à la « politique américano-israélienne qui repose sur la force des armes » que le Courant patriotique libre « a su comprendre la Résistance, a conclu avec elle l’accord d’entente et l’a soutenue au cours de la guerre de juillet » 2006, a insisté M. Aoun.
Critiquant la politique de l’administration américaine concernant le Moyen-Orient, il a affirmé que « ce que nous faisons est l’exercice d’un droit sacré pour défendre notre existence, parce qu’il n’est pas normal que la seule superpuissance au monde continue à menacer notre existence pour préserver ses intérêts ».
M. Aoun a affirmé par ailleurs que « notre conflit avec l’administration américaine » ne se traduit pas par une « hostilité envers le peuple américain avec qui nous partageons les mêmes valeurs humanitaires ».
S’adressant aux chrétiens du Liban, M. Aoun a déclaré : « Votre rôle dans votre pays est pionnier et apostolique, ce qui implique des obligations et un certain comportement. » Il les a appelés à vivre « dans cet Orient » leurs « vertus divines », soulignant dans ce cadre que l’amour vainc l’injustice, la foi « multiplie » leur force et l’espoir protège contre le désespoir. Et d’insister sur les « enseignements des Églises orientales », notamment le Concile du Vatican II, le Conclave patriarcal maronite et l’Exhortation apostolique, qui permettent aux chrétiens du Liban d’accomplir leur mission.
Invitant enfin les chrétiens « à se porter solidaires » avec les autres communautés du Liban, il a affirmé que les événements des trois dernières années ont montré que « nous ne sommes forts que lorsque nous comptons sur nous-mêmes ».
Un document fondateur
C’est Me Chakib Cortbawi qui a donné lecture du communiqué final de la Rencontre chrétienne nationale, qui a pris les allures d’un véritable document fondateur, en douze points.
Le texte reconnaît ainsi le Liban comme « terre des messages célestes, un modèle de civilisation fondé sur le dialogue et la coexistence entre les cultures et les religions, notamment la coexistence islamo-chrétienne ». Il affirme de même que le « Liban est le pays des libertés, où tous les citoyens sont égaux devant la loi ».
« Nous nous engageons à respecter la Charte internationale des droits de l’homme, les chartes de l’Organisation de Nations unies, le traité international pour les droits civils et politiques, les chartes de la Ligue arabe, l’Exhortation apostolique, l’appel du synode et tous les enseignements religieux, poursuit le texte. Nous nous inspirons dans notre lutte politique des valeurs intellectuelles qui rejettent toute forme de suivisme et nous appelons à la pluralité, la diversité et la tolérance. »
Le communiqué fondateur de la Rencontre chrétienne nationale appelle par ailleurs à « la fondation d’un État laïc, basé sur la citoyenneté », et s’engage entre-temps « à respecter les chartes actuelles qui gouvernent notre système basé sur la reconnaissance des droits de chaque communauté ».
Déclarant que « l’atteinte aux droits des chrétiens porte préjudice à leur présence et à leur rôle », la Rencontre chrétienne nationale se dit préoccupée par « le déséquilibre démographique qui a résulté du décret de naturalisation », « l’émigration des chrétiens et leur incapacité à revendiquer la nationalité libanaise », « la mauvaise représentation des chrétiens au sein du Parlement à cause de lois législatives injustes », la marginalisation des chrétiens au sein « des gouvernements, des administrations publiques, des conseils et des institutions sécuritaires et militaires », sans oublier le danger de « limiter les prérogatives du chef de l’État et d’affaiblir sa position ».
Le communiqué met par ailleurs l’accent sur trois dangers : l’implantation « susceptible de renverser l’équation démographique », l’achat des terrains par des non-Libanais, contrairement aux lois en vigueur, et la dette publique. Et d’insister sur la nécessité de reformer la classe moyenne qui demeure « la base de la stabilité du Liban » et d’accorder une plus grande importance à la décentralisation administrative, au développement équilibré et durable, comme aux problèmes de l’émigration des cerveaux et des jeunes.
Saluant le rôle des hommes d’affaires qui participent à l’essor du Liban, la Rencontre chrétienne nationale met toutefois en garde contre « le fléau de l’argent politisé ». Elle s’engage par ailleurs à lutter contre la corruption afin de construire un État « propre et transparent », et affirme que seul un État libanais « unifié, capable et juste est une garantie pour les chrétiens ».
Le document affirme par ailleurs que la solution à la crise régionale ne peut se faire sans un règlement global et juste du conflit arabo-israélien. « Le Liban a un rôle à jouer pour renforcer les relations entre les pays et le peuple arabe pour trouver les solutions à leurs problèmes politiques, économiques et culturels. » Le communiqué souligne dans ce cadre que, pour assurer la pérennité des projets chrétiens, il ne faudrait pas isoler le Liban de son environnement. Les chrétiens et les musulmans sont ainsi appelés à donner un exemple de coexistence et de cogouvernance.
Le document de la Rencontre chrétienne nationale appelle enfin à :
– respecter la Constitution libanaise ;
– soutenir le président de la République et consolider ses prérogatives afin qu’il puisse jouer son véritable rôle de chef de l’État, de symbole de l’unité nationale, de protecteur de l’indépendance, de la souveraineté, de l’entente et des libertés publiques ;
– rédiger un règlement interne pour le Conseil des ministres ;
– promulguer une loi législative juste et adopter temporairement le caza comme circonscription électorale, comme le stipule l’accord de Doha, et assurer un mécanisme permettant aux Libanais de l’étranger de voter et de se porter candidats ;
– rectifier le déséquilibre à la représentation chrétienne au sein du gouvernement, de l’administration, des institutions sécuritaires et militaires, et limiter leur émigration, notamment parmi les jeunes ;
– clore les dossiers des déplacés chrétiens de la Montagne dans le cadre d’un congrès international, résoudre le problème des réfugiés libanais en Israël et des détenus libanais en Syrie ;
– opérer une réforme radicale dans l’administration et la justice.
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